Le parc immobilier algérien ne répond pas à la forte demande exprimée. La cherté des appartements pousse les ménages à opter pour la location. «Nous avons une liste de F2. Les tarifs de la location varient entre 20 000 et 25 000 DA le mois», a affirmé hier un gérant d'agence immobilière à proximité de la salle Harcha, dans la commune de Sidi M'hamed. Nous nous sommes présentés à cette agence comme étant des futurs mariés à la recherche d'un logement pour cet été. L'agent sur place, après le mabrouk d'usage, a proposé «un F2 près de la mosquée El Houda, avec un salon spacieux, une chambre et une belle cuisine». En le questionnant sur la salle de bains, il a répondu : «Certes, il n'y a pas de baignoire, mais la douchette peut faire l'affaire.» Pour nous convaincre, notre interlocuteur a indiqué que «les nouveaux mariés recourent généralement à location au cours des deux premières années de leur mariage». En feuilletant son registre, il a proposé un autre F2 dans la commune de Belouizdad, à 25 000 DA le mois. Le désintéressement affiché de notre part poussa l'agent immobilier à nous présenter d'autres logements, cette fois-ci de type F3. «J'ai dans ma liste un très bel appartement à 28 000 DA le mois. Deux chambres, un salon, une cuisine spacieuse, avec salle de bains… sans baignoire.» Lui exposant notre situation socioprofessionnelle — des fonctionnaires smicards — notre interlocuteur adopta un autre ton. «Vous savez, vous n'êtes pas le seul à avoir une faible rémunération. Dans ce cas, je vous suggère des F2 ou des F3 à Cherarba, pas loin des Eucalyptus, au sud-est d'Alger.» L'air désolé, notre interlocuteur essaya de nous persuader : «Cherarba n'est pas si mal, il y a de la verdure, elle est proche de l'autoroute et les tarifs de la location sont abordables.» En effet, située à 40 km du centre-ville, les logements dans cette commune, anciennement agricole, sont loués entre 9000 et 14 000 DA le F2 et 14 000 et 18 000 DA le F3. Un an d'avance cash Nous nous rendîmes à une autre agence située dans le quartier Lamartine, à Belouizdad. Elle ressemble à une salle d'interrogatoire digne du pénitencier de Guantanamo. L'agent immobilier était cependant plus compréhensif et plus coopératif que le précédent. Après avoir fait part de notre situation de futurs mariés, notre interlocuteur nous soumet une liste de F2, dont le moins cher, près de Laâqiba, est à 18 000 DA/mois. $ Il a toutefois précisé que «l'appartement nécessite quelques travaux avant d'être habité». Répondant par la négative, nous avons demandé un F3. «Ce type d'appartements est le plus demandé par les ménages. Ils sont rares et à chaque fois qu'un F3 se libère, il trouve preneur deux jours plus tard», a-t-il expliqué. «Le seul qui me reste se trouve à Ruisseau et le propriétaire demande 28 000 DA avec un an d'avance.» Comment un simple salarié algérien peut-il vivre décemment et subvenir à ses besoins lorsqu'il lui est exigé une avance de loyer d'un an ? Pourtant, cette obligation n'est inscrite dans aucun texte juridique. «C'est devenu une tradition. Ceci a été provoqué par la méfiance des propriétaires vis-à-vis des locataires», a-t-il indiqué. «Néanmoins, continue-t-il, je connais des locataires qui entretiennent de bonnes relations avec les propriétaires qui leur permettent de payer mensuellement.» L'agent immobilier approché nous a tout bonnement recommandé un prêt Cnep ou déposer un dossier pour acquérir un logement par le biais de la formule LSP. «C'est la seule solution», a-t-il affirmé avec conviction. «Vous êtes jeunes et vous aurez tout le temps d'achetez votre propre appartement. Je travaille depuis plus de 20 ans dans l'immobilier, et je sais ce que je dis. Les prix de vente et de location vont encore grimper, notamment dans le centre-ville qui connaîtra une flambée ahurissante lorsque le métro démarrera.» Aussi, et selon notre interlocuteur, «le marché de la location dans les communes du centre d'Alger est saturé, un peu moins en banlieue algéroise». Force est de constater que les tarifs de la location varient d'un lieu à un autre. Crise du logement oblige, cela crée une sorte de ségrégation sociale. Vivement un futur programme de 10 millions de logements !