Les revendications sont claires, le peuple veut «le départ de tous», et une transition démocratique dirigée par des hommes qu'il choisira. Les Algériens sont à nouveau mobilisés pour un 13e vendredi de contestation. Des centaines de milliers de manifestants se sont rassemblés dans le centre d'Alger, pour réclamer le départ du système et leur refus de l'élection présidentielle prévue pour le 4 juillet prochain. Pour ce 2e vendredi de mobilisation durant le mois de jeûne du Ramadhan, les Algériens ne lâchent pas prise. A Alger, le rassemblement devant la Grande poste à commencé tôt vers 9h30, avant que des grandes foules n'aient battu le pavé après la prière hebdomadaire. Le climat a été particulièrement tendu. La police, déployée en nombre depuis le début de la matinée, a empêché l'accès aux marches de la grande poste avec leurs camions. L'ambiance tendue a été marquée par quelques bousculades, mais sans heurts dans l'immédiat. «Honte à vous, policiers», criaient des manifestants. «Non aux élections» prévues le 4 juillet pour élire un nouveau président de la République, pouvait-on lire sur certaines pancartes. Les revendications sont claires, le peuple veut «le départ de tous», et une transition démocratique dirigée par des hommes qu'il choisira. «Le pouvoir maintient toujours son calendrier électoral, alors que nous le jugeons intenable pour avoir un véritable renouvellement de la classe politique, et voulons une période de transition politique», fait-on savoir. Les manifestants réclament également l'avènement proche d'un «Etat civil». L'autre sujet du jour, c'est le rejet de l'omniprésence de l'armée, et surtout de l'homme fort du pays: le chef d'état-major, Ahmed Gaïd Salah. Ce dernier a, encore une fois, été la cible des manifestants. «Pas d'Etat militaire !», «Gaïd Salah dégage !», ont-ils scandé. Les manifestations lui reprochent, notamment, sa persistance pour la tenue de la présidentielle du 4 juillet, alors que le peuple la rejette et refuse qu'elle soit chapeautée par les héritiers du système, à savoir en tête le président par intérim, Abdelkader Bensalah, et le Premier ministre, Noureddine Bedoui, mais aussi le général Gaïd Salah. «Si le système maintient les élections pour le 4 juillet, cela revient à exacerber les tensions et à accentuer la crise», a-t-on estimé. Pour d'autres manifestants, «le mouvement populaire pacifique n'est pas près de s'essouffler. Le pouvoir s'accroche à l'organisation des élections le 4 juillet. Et nous, on s'accroche à nos revendications. Le jeûne va au contraire nous donner plus de détermination pour réussir notre révolution». «Ce pouvoir n'a aucune vision, il temporise et joue sur l'usure. Sauf que le peuple ne lâchera pas prise jusqu'à l'avènement d'une 2e République», a-t-on assuré. Le dépôt des candidatures à la présidentielle se termine jeudi prochain, et pour le moment, pas de grande figure de l'opposition, peu de candidats ont validé leur candidature. Il faut voir si cette date pourra être maintenue. L'exigence du départ de Gaid Salah n'est, néanmoins, pas partagée par tous. Si à Alger le rejet est très fort, dans le reste du pays, beaucoup soutiennent toujours l'armée, au nom d'un certain nationalisme. Même l'opération mains propres lancée par Gaid Salah pour purger le pays de la corruption, en incarcérant des hommes d'affaires, sans procès et avec l'aide d'une justice aux ordres et expéditive, ne semble plus susciter l'adhésion du peuple qui réclame, avant tout, le départ de toute la «bande». Les manifestant ont, notamment, dénoncé les récentes convocations et arrestations par la justice d'anciens responsables politiques, y voyant une volonté de «dévier» le mouvement de ses revendications. «Il ne faut pas qu'ils nous bernent avec ces arrestations, pour aller aux élections», «le scénario égyptien ne se répétera pas en Algérie. Et toute mascarade ne va pas nous dévier de notre but», disait-on à Alger.