Ça ne se voit pas comme on aurait aimé que ça se voie mais il y a une finale de Coupe d'Algérie de football qui va se jouer le 1er mai prochain. Dans la foulée, ça nous rappelle même qu'il y aura un… 1er mai cette année ! C'est un peu tiré par les cheveux mais les malins ont fini par trouver un lien entre la «fête du travail» et la «fête du football». Les malins, ce sont d'abord ceux qui ont pensé à programmer cette rencontre à une date saugrenue mais désormais «rentrée dans la tradition». Pas si saugrenu que ça pourtant, dans un pays où il n'y a pas plus de travail que de football depuis longtemps déjà. Les malins, ce sont aussi ceux qui ont réussi à faire oublier et le foot et le travail pendant des mois, sous prétexte qu'il y a une élection présidentielle en vue. Enfin, «réussi» est une façon de parler, parce qu'ils n'ont rien fait oublier du tout. Grâce aux «assiettes» et aux «zapettes», les Algériens ont souvent… oublié le monde de la vraie vie en se posant dans les tribunes des stades d'Europe et de Navarre. Là-bas, ils ont peut-être de moins en moins de travail mais ils ont toujours du football. Quant au travail, ceux qui en ont un se rappellent qu'il faut quand même aller bosser de temps en temps parce les employeurs font semblant de les payer. Le autres attendent dans le désespoir ou pensent à l'émeute, en désespoir de cause. Les malins enfin, sont ceux qui font comme si de rien n'était. Ils se préparent pour la finale en se foutant royalement du travail et de la fête du travail. D'abord parce qu'ils n'ont que le foot même s'il n'y a pas de foot, ensuite, ils n'ont pas besoin de trimer au labeur pour ne «s'habiller que de grandes marques», pour reprendre la célèbre chanson des soirées de stade et de journées d'émeutes, même si elle est tombée quelque peu en désuétude. La chanson a dû être géniale en son temps, mais c'est loin, Octobre 1988. Ce n'est pas tous les jours qu'il y a une finale de Coupe d'Algérie de football. Ce n'est pas chaque année, non plus, que le Mouloudia et la JSK se retrouvent à «ce stade de la compétition» pour rester dans le vocabulaire désuet. Ou pour faire plus simple, dans la langue de bois des journalistes sportifs. Ce sont également la JSK et le Mouloudia qui sont «un peu désuets» mais ça, il ne faut pas le dire. La première est devenue un lointain ersatz d'un «jumbo jet» mythique et la deuxième une pâle copie d'un «doyen» qui ne fait rien d'autre que vieillir. Mais il ne faut pas le dire. Alors il faut dresser les banderoles et faire semblant de s'enthousiasmer. Après tout, on s'enthousiasme bien à l'idée que la «fête du football» se déroule dans un stade Tchaker d'une autre ère géologique mais qui dispose quand même de la «meilleure pelouse du pays» ? Mais ça, non plus, il ne faut pas le dire. N'est-ce pas que c'est sur cette pelouse que les Verts se sont qualifiés pour la Coupe du monde ? Ah, non seulement l'Algérie est qualifiée mais il y aura bien une Coupe du monde ? Il paraît que oui et c'est au Brésil. Là-bas, entre le travail et le foot, le lien est vite fait. Dans la rue. Mais là- bas, c'est une autre histoire. [email protected]