Le parquet de Paris va ouvrir une enquête préliminaire pour «blanchiment de fraude fiscale» à l'encontre des groupes Michelin, Elf et Adidas. Ils sont soupçonnés d'avoir monté un circuit d'évasion fiscale via des fondations au Liechtenstein. L'affaire a démarré par la fourniture au fisc français d'une liste de fraudeurs débusqués par les services secrets allemands. Les trois groupes se disent surpris. Michelin, Total (via Elf Trading) et Adidas sont soupçonnés d'avoir monté des filières d'évasion fiscale par le biais de comptes bancaires de fondations. Michelin et Total s'en défendent et vont jusqu'à démentir posséder le moindre compte au Liechtenstein. Quoi qu'il en soit, la justice tirera l'affaire au clair, puisque le parquet de Paris a confirmé l'ouverture d'une enquête préliminaire dans les prochains jours. Cette affaire qui agite les milieux financiers européens et américains puise ses racines en Allemagne. Il aura fallu plus d'une année d'enquête pour aboutir à ces mises en cause judiciaires. Et les trois groupes cités sont loin d'être les seuls impliqués. Tout s'est fait dans la grande tradition des services secrets par la remise d'un DVD aux services allemands. Sur leur écran, les agents voient apparaître des dossiers bancaires de clients d'un groupe de la principauté, LGT. La fuite vient d'un informaticien de cette maison jusque-là inviolable, Heinrich Kieber, qui a reçu 4 millions d'euros en échange de ses bons offices. Sur le DVD, les enquêteurs découvrent les noms de plusieurs grands patrons américains et européens qui se seraient laissé aller à mettre quelque monnaie pas si menue que ça dans les coffres de ce petit Etat montagnard niché entre la Suisse, l'Allemagne et l'Autriche, et dont le secret bancaire hermétique est la grande spécialité. Ayant exploité les informations qui les concernaient, les services allemands ont partagé le DVD avec leurs collègues européens, français notamment. Le volet hexagonal de l'affaire comporte une soixantaine de personnes et entreprises. Il est d'abord pris en main par le fisc qui négocie un «gentlemen's agreement» avec certains contrevenants. Ils acceptent de régler les arriérés d'impôts correspondant aux sommes dissimulées et les amendes qui vont avec. Le fisc français espérait ainsi récupérer 10 à 20 milliards d'euros sur une fraude initiale de 1 milliard.