Il est pour le moins paradoxal que le FLN et le RND ne s'entendent pas sur une forme de soutien au chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika.Alors qu'ils défendent sans réserve et sans conditions toutes les décisions et chantiers du Président, ils n'arrivent pas à trouver la meilleure forme d'organisation pour concrétiser ce soutien. Depuis l'enterrement de la défunte alliance présidentielle en 2012, suite au retrait du parti islamiste, le MSP, les deux partis naviguent à vue. Ils sont arrivés même à se disputer le soutien à Bouteflika. Lorsque le RND a lancé son projet d'une nouvelle alliance avec les partis au gouvernement, le FLN a immédiatement réagi en rejetant la forme proposée par son dauphin dans toutes les institutions. Le FLN a justifié qu'étant le parti majoritaire, il était de son droit de conduire toute coalition. Il a alors proposé un front de soutien élargi à tous les partis politiques et organisations de la société civile. La réponse du RND ne s'est pas fait attendre. Le secrétaire général par intérim du parti, Ahmed Ouyahia, a décliné l'offre du patron du FLN, Amar Saâdani. «Le FLN est un allié stratégique mais son mode ne nous convient pas», a répliqué Ouyahia. «Les alliances telles quelles ont été conçues dans le passé ne sont plus valables, car aujourd'hui le FLN est la locomotive», ripostera, 24 heures plus tard, Saâdani. C'est que le désaccord est profond. Guerre de positionnement Bien évidemment, il ne peut s'agir que du principe de réciprocité appliqué par l'un contre l'autre. C'est un désaccord politique et certains observateurs évoquent un différend né depuis les fameuses attaques du patron du FLN contre l'ancien chef du DRS, le général Toufik. Pour le politologue Rachid Grim, «c'est un problème de positionnement pour les futures joutes» qui est posé entre les deux partis au pouvoir. Il s'agit, a-t-il précisé, de la révision de la Constitution et de la composante du futur gouvernement. «La vraie bataille sera autour de la mouture de la Constitution», estime notre interlocuteur, joint au téléphone hier, évoquant l'introduction éventuelle de certaines closes importantes pour la succession, comme le poste de vice-président. En effet, l'enjeu pour les deux partis est l'appartenance de la personne qui va être à la tête du gouvernement. Le FLN demande que le chef du gouvernement soit issu du parti ayant la majorité parlementaire, ce qui n'arrange pas les affaires du RND. Rachid Grim ajoute que le FLN veut accaparer tous les pouvoirs. «Il veut tout diriger : l'APN, le Sénat (dirigé actuellement par le RND, Ndlr) et le gouvernement», a-t-il soutenu. «Ils se positionnent pour l'après-Bouteflika», a tranché notre interlocuteur. Une conclusion partagée par Ali Brahimi, observateur de la scène politique nationale et porte-parole du Mouvement citoyen pour les libertés et le développement (MCLD). «Le FLN et le RND ne s'entendent pas sur la démarche à suivre pour soutenir le Président parce que les deux premiers dirigeants des deux partis ne soutiennent pas le même successeur pour Bouteflika», a-t-il expliqué. Cette déclaration d'Amar Saâdani qui accuse le RND de se servir du FLN pour arriver au pouvoir en dit long sur le profond désaccord entre les deux partis. «Pour certains, arriver au pouvoir est une fin en soi. Pour nous, les choses sont différentes. Nous sommes au pouvoir et nous soutenons depuis 1999 le président Bouteflika.» «La perspective est donc totalement différente», estime Ali Brahimi. «Mais les deux partis ne vont pas s'affronter publiquement autour de toutes ces questions», prédit le politologue Rachid Grim.