Le Temps d'Algérie : Deux médecins internes ont trouvé la mort lors d'une évacuation du CHU de Sétif vers Alger. Etaient-ils habilités à le faire ? Lyes Merabet : Effectivement, ces deux médecins internes n'avaient pas encore leur diplôme et donc n'étaient pas habilités à faire des gestes ou à assister un malade en évacuation. Leur place est dans le service où ils suivent leur formation de fin de cycle. D'autant qu'ils sont toujours en 7e année de médecine et dépendent du ministère de l'Enseignement supérieur. Malheureusement, ils ont été chargés de transférer un malade, ce qui n'est pas de leur ressort. Nous présentons à leurs familles nos sincères condoléances. Pourquoi, selon-vous, ce phénomène subsiste et touche l'ensemble des établissements de santé ? Je peux vous dire qu'il s'agit, malheureusement aussi, d'une règle. J'exerce ce métier depuis 26 ans, et durant mon internat vers la fin des années 1980, j'ai eu à accompagner des malades sur une distance de 40 km. Cependant, il ne faudrait pas se limiter à cette problématique, car il s'agit de problèmes de fond qu'il faudra prendre en charge. Il y a une mauvaise gestion et une mauvaise organisation du système de santé. Dans le drame survenu ce mardi, le malade était transféré d'un CHU à Sétif vers un autre CHU à Alger sur une distance de 300 kilomètres. Ce qui n'est pas normal c'est de transférer un malade d'un service spécialisé relevant d'un CHU à un autre. La question ici se pose sur le statut de ces établissements s'ils n'ont pas de moyens. Ce qui nous emmène à poser la problématique de la prise en charge des malades et l'accessibilité des citoyens aux soins. Aujourd'hui, nous assistons à des évacuations sur des milliers de kilomètres. Donc, derrière ce drame, il y a un problème de fond dans ce système de santé. Des médecins internes accusent les chefs de service de les exploiter sous peine de ne pas leur signer le rapport de stage qui donne droit au diplôme... Ce n'est pas le cas de tous les services et il ne faut pas non plus généraliser. Il y a des professeurs qui sont intègres. Mais, il ne faut pas nier que certains abusent de sollicitations pour d'autres tâches qui n'ont rien à voir avec la formation des médecins internes. Il y a lieu donc de se manifester et rappeler certains responsables à leurs obligations. Si on se fie à la règlementation, celui qui devrait assurer une évacuation est un médecin-réanimateur, habilité à faire les gestes qu'il faut en cas de complications. Il est assisté par des membres du personnel paramédical. Enfin, il serait accessoire de se concentrer sur cette question, puisque le problème est de fond concerne la formation, les moyens, l'accessibilité aux soins et la redéfinition des missions et redistribution des moyens selon les besoins.