Le village des artistes a été inauguré en 1984, avant même le centre commercial de Riadh El-Feth. Les boutiques avaient été attribuées sur concours aux meilleurs artisans algériens. En ce mardi du mois de mars, un brin de nostalgie nous a amenéa à faire un petit tour au village des artistes de Ryadh El Feth à Alger. On s'est rappelé qu'en 1984, de grands maîtres artisans tels que l'ébéniste Hamid Kobtan, le tisserand Mohamed Hamlat et Hadj Zolo avaient quitté leurs boutiques de la Casbah d'Alger pour le nouveau village. A l'époque, les artisans étaient contents de se retrouver dans un lieu propre pour accueillir les visiteurs venant en famille même tard, notamment en été. Le chemin menant au village dégageait une odeur toujours fraîche et les roses plantées de part et d'autre étaient bien entretenues. La direction animation de l'époque mettait à la disposition des artisans une spécialiste pour la décoration des devantures et les visiteurs éprouvaient un grand plaisir à voir les artisans à l'œuvre et écouter leurs explications. Des écoliers et des enfants accompagnés de leurs parents venaient voir le dernier tisserand d'Alger, Mohamed Hamlat, manier son «cheblitou» et son «rechtiliou» (outils de tissage). Au même moment, le luthier Nifer donnait les dernières retouches au «qanoun», cet instrument à 78 cordes dont il a laissé les secrets de fabrication à ses enfants qui tentent de continuer sur la voie du père. Plusieurs métiers ont disparu En ce mardi du mois de mars, des images nous ont choqués à l'entrée du chemin y menant et à l'intérieur des bâtiments. Point de roses, point d'art. Mis à part quelques artisans continuant de survivre, tout est mort au village des artistes. Le bois jonchant les jardins a été remplacé par un trottoir en béton mal entretenu. Dès l'entrée du bloc 12, on remarque l'absence des deux tisserands. Le départ de feu Hamid Kobtan, le grand ébéniste, avait eu lieu en 1985. Le dinandier Hadj Zolo est également absent et sa boutique a été attribuée à un céramiste. Le grand dinandier Zolo qui attirait à lui seul des centaines de curieux par jour est mort au Maroc, son pays d'origine. Le deuxième spécialiste du cuivre Bentchekkar est également parti. Le spécialiste du verre soufflé Ghersa a choisi de partir avec son savoir-faire et son art en France. Les boutiques gérées par les enfants de Nemchi et Ogal qui résistent malgré toutes les contraintes pour sauvegarder la bijouterie berbère sont fermées ce mardi, peut-être à cause du climat et de l'absence de visiteurs. Abdelkader Boumala, le calligraphe, a également tenu à rester au village pour s'adonner à son art. Hocine Ameziane qui tenait la boutique de vannerie est également décédé mais aucun artiste ne l'a remplacé. Avec le départ de ces artisans, ce sont plusieurs métiers qui ont disparu. Abdelkader Ghorab, le spécialiste du bois tourné qui a appris son métier auprès des Egyptiens a également quitté sa boutique nous a- t-on dit. En ce mardi, on s'est rappelé que le village des artistes de Riadh El-Feth devait être la vitrine de l'artisanat en Algérie et une vraie porte pour l'attrait des touristes. Aujourd'hui, le village est devenu un exemple de la mauvaise gestion du secteur du tourisme et de l'artisanat en Algérie. On se demande pourquoi les gestionnaires qui étaient à la tête de l'office Riadh El-Feth à l'époque avaient réussi à créer ce village, à le gérer et attirer les visiteurs algériens et étrangers malgré quelques difficultés que rencontraient les artisans, et pourquoi, les gestionnaires actuels n'arrivent pas à relancer l'activité.