Rares sont les citoyens qui préparent leurs vacances avant la période des congés. Les nantis eux ont déjà une idée en tête, des vacances en Egypte, en Tunisie ou encore en Turquie. Les fonctionnaires, enseignants et autres pensent à une évasion de quelques jours au bord de la mer, alors que les ceux qui arrivent à peine à tenir jusqu'à la fin mois sans emprunter ne désespèrent pas, une journée à la plage et quelques baignades au niveau des barrages suffisent à leur faire oublier ce handicap. En effet, préparer avec soin ses vacances n'est pas ancré dans la mentalité des habitants de la région, bien qu'ils soient nombreux à vouloir goûter au plaisir de la mer durant la période estivale, surtout que cette année, les vacances seront de courte durée, les congés débutant le 1er juillet et le Ramadhan commençant le 1er août. Les familles dont les enfants viennent de passer l'examen du baccalauréat devront attendre les résultats alors que celles qui ont une parente ou un parent qui se marie doivent renoncer aux vacances. Néanmoins, les mordus de la plage ne renonceront sous aucun prétexte. Mohamed, marié avec un enfant à charge, un agent de sécurité dont le salaire avoisine les 20 000 DA, a la chance de partir en vacances avec son voisin employé à Sonatrach. «Chaque année mon voisin m'invite à passer une dizaine de jours au camp de la société», dit-il, avouant toutefois qu'il ne peut se permettre des folies durant son séjour en bord de mer. «Je mange comme à la maison, tchektchouka, couscous, pâtes et rarement de la viande», affirme-t-il. Abderrahmane, fonctionnaire, a fait ses calculs. Pour le mois de juillet, il a déjà réservé une chambre dans un camp de vacances à Chenoua plage, une chambre qu'il partagera avec son beau-frère. «Nous nous sommes mis à deux pour louer une chambre à 6500 DA par jour car les chambres au niveau des complexes touristiques sont inaccessibles. Le prix d'une chambre à deux dépasse les 5000 DA alors que dans le camp on peut être 8 dans une chambre», explique-t-il. La côte tunisienne pour les uns, algérienne pour d'autres Hamid, Samir et M'hamed ont confirmé leur arrivée au début du mois de juillet au propriétaire de la villa qu'ils ont l'habitude de louer à Sfax en Tunisie. «Pour dix millions de centimes algériens, nous avons une villa située à 150 mètres de la plage dans un coin superbe», dit Hamid. «En plus de nos familles composées de 13 personnes, nous pourrons accueillir sans gêne d'autres amis», affirme-t-il. Samir, quant à lui, ne supporte pas le voyage Aïn Defla-Sfax et fait remarquer qu'à part le carburant qui est un peu cher en Tunisie tous les autres produits sont à des prix raisonnables. «On fuit les regards et les mauvaises rencontres», lance M'hamed. Benyoucef, «chômeur professionnel», la cinquantaine, ne peut se passer des vacances au bord de la plage. Pour les habitants de Petit-Port à Mostaganem, il est devenu une figure qui a sa place dans le décor estival de cette zone touristique. Benyoucef est un cas spécial. Ses vacances s'étalent sur trois mois. Il est à Petit-Port dès le 1er juillet et il ne rentre chez lui que le 30 septembre. Il ne répond à aucune invitation durant son séjour. «Pendant les vacances je suis absent pour tout le monde. D'ailleurs j'éteins mon portable», déclare-t-il. Il avoue que l'année passée il a passé le Ramadhan en famille à la plage. «Je passais mes journées entre le sommeil et les courses, et le soir c'était baignade jusqu'au s'hor.» Cette année, il compte également passer le Ramadhan au bord de la mer. «Durant le mois sacré, la vie est moins chère ici qu'à Miliana du fait que les pêcheurs et les fellahs deviennent généreux envers tous les estivants», reconnaît-il. L'été, Krimo, artisan dans la tenture et le voilage travaille parfois 14 heures par jour pour satisfaire sa clientèle. Il ne pense pas aux vacances et refuse de laisser ses enfants partir à la plage avec d'autres personnes, même avec ses parents. «Mes gosses sont turbulents et j'ai peur pour eux», résume-t-il. Vacances à la Corne d'Or, Matarès, CET, sortez vos euros ! Hadj Kouadri Djelloul, gérant d'une agence de voyage, ne comprend pas la politique touristique de l'EGT Tipaza qui offre un package de 399 euros par personne adulte pour un séjour d'une semaine en pension complète comprenant la traversée par ferry Alger-Marseille, la navette Alger-Tipaza, l'entrée gratuite à toutes les manifestations culturelles et sportives se déroulant au niveau des sites La Corne d'Or, Matarès et au CET. «C'est vraiment offert à ce prix-là», en soulignant que l'euro est à 145 DA àr la bourse des changes clandestine. «Le tourisme est inabordable pour les locaux», a-t-il ajouté en faisant remarquer qu'une chambre pour une personne à l'hôtel Zianides est affichée à 9000 DA la nuitée et à 6500 DA à Hammam Righa. Le Ramadhan d'abord Karima, Moussa et Mouadh, des gamins dont l'âge varie entre 10 et 12 ans habitent à Bourached où ils sont scolarisés au primaire et vendent du pain maison à Aïn Defla. «Mes grands frères sont maintenant à l'université. Ils vendaient aussi de la «koucha» quand ils étaient petits. Nos vacances on les passe ainsi», affirme Karima qui n'a vu la plage qu'à la télévision. «Mes frères vont à Bouira pour récolter de la pomme de terre et de la salade», ajoute-t-elle. Moussa partira sûrement un jour ou deux à la plage, mais son objectif c'est de ramasser de l'argent pour s'acheter une ou deux brebis. «Quand je serai grand, j'espère m'acheter un microbus et profiter autant que je peux de la mer.» Mouadh, quant à lui, va se contenter d'une baignade dans le barrage. «J'économise pour la prochaine rentrée», dit-il. De nombreux citoyens n'ont pas voulu se prononcer préférant parler du Ramadhan et des dépenses attendues.