Il y a des films qu´on peut voir plusieurs fois dans sa vie sans s´en lasser. Au contraire, tous les jours, il vous arrive de découvrir, à chaque vision ou à chaque projection, une nouvelle richesse de films. Il faudrait pour cela que le film soit très riche et que la profondeur de son champ puisse permettre chaque fois au spectateur de sonder un aspect de sa réalisation. Il était une fois dans l´Ouest est de ces films dont l´épaisseur dépasse celle de plusieurs palimpsestes... Il faut dire que le réalisateur Sergio Léone est d´une carrure impressionnante - tout comme sa carrière. Parti du péplum qu´il traite sur un ton humoristique, il s´illustra dans le western spaghetti où l´hémoglobine coule à discrétion, où la poussière de l´Ouest emplit l´écran dans toute sa profondeur et où la crasse des cow-boys sautent au nez des téléspectateurs. On est loin des westerns BCBG où Gary Cooper, Allan Ladd, Randolph Scott, les cheveux toujours gominés, se retirent toujours impeccablement, même après une bagarre dans la boue: le coup de peigne est de rigueur. Seuls les films sur les chercheurs d´or (Trésor de la sierra Madre, Jeremiah Johnson) donnent une idée de la saleté qui pouvait exister dans les camps de pionniers ou dans les villes naissantes, où le bois est l´élément de base dans toute construction. La première vision d´Il était une fois dans l´Ouest peut révéler un scénario assez simple: c´est une simple histoire de vengeance dont le fil conducteur est l´air lancinant joué par un harmonica manié par un Charles Bronson placide. La deuxième vision peut se focaliser sur l´impressionnante brochette d´acteurs, où une fraîche et séduisante Claudia Cardinale donne un attachant contrepoint à la brutalité et au cynisme des interprètes masculins, Jason Rolands, brutal et humain, Henri Fonda, cynique et froid et Charles Bronson, calme et déterminé. L´autre singularité du film réside dans les costumes où à la place des jeans et des vestes en peau habituelles, les tueurs sont revêtus de cache-poussières misérables qui accentuent leur laideur morale. La musique d´Ennio Moricone est l´élément crucial du film : elle souligne, annonce ou accompagne les éléments dramatiques du récit. Mais la plus grande valeur du film réside dans la richesse et la fonction des bruitages. La densité du drame est précédée ou soulignée par toutes sortes de bruits: bourdonnements agaçants d´une mouche, vols de perdrix, grincements de portes, de poulies, persistance des bruits de chariots...Il faudrait toute une encyclopédie pour en faire l´inventaire. C´est un film qui a influencé Sam Peckinpah dans toute la filmographie qui suivra après 1968.