On ne saurait citer les exemples tant ils sont nombreux, ni conter toutes les histoires de ceux qui, pour une raison ou pour une autre, ont quitté la mère patrie pour vivre sous d´autres cieux, puis revenir un jour plein d´usages et raison vivre entre les leurs le reste de leur âge... Mais l´histoire devient plus dramatique quand ceux qui sont partis ont quitté une patrie occupée par une autre nation et que leur identité à eux, a commencé à se dissoudre petit à petit. Les caméras de la télévision, au début des années 90, nous ont montré la diaspora algérienne vivant au Moyen-Orient et gardant encore le langage, les manières, les us et coutumes de leurs ancêtres qui se sont exilés au temps de l´émir Abdelkader ou après les diverses insurrections qui ont échoué... Ceux-là étaient partis emmenant avec eux, femmes et enfants. C´est pour cela qu´ils gardent encore bien ancrée en eux, la tradition algérienne, mais les plus malheureux furent, sans aucun doute, ceux qui ont été déportés vers les bagnes de Cayenne et de Nouvelle-Calédonie et qui, au terme de leur peine, sont devenus trop vieux pour retourner au pays, situé aux antipodes. Comment avoir envie de revenir dans un pays encore occupé, eux qui ont été bannis pour avoir osé résister à la loi du plus fort. Ce n´est pas pour rien que le bagne de Nouvelle-Calédonie a été créé si loin : c´est pour casser à tout jamais la volonté de résistance des nationalistes algériens et des communards français qui se sont retrouvés à l´île des Pins, du même côté de la barrière. Et la grande qualité du documentaire réalisé par Saïd Eulmi est d´avoir réussi à saisir et à restituer ces frères d´un autre monde. Qu´ils ont fière allure! Ils arborent ostensiblement leur origine, même si dans leurs veines, en plus du sang algérien, coule un sang canaque, européen ou asiatique. C´est toujours celui du bagnard fondateur qui domine! Et puis ce besoin de retrouver ces racines! Il faudrait plus que ces pages ou ce film pour rendre hommage à ce moudjahid de la paix et reconstituer le lien ombilical entre l´Algérie et ces fils perdus! Il n´y a aucune utilité matérielle dans tout cela, mais un cimetière, une fantasia, une zerda, cela crée des liens. Et on se prend à songer à tous ces fils de l´Algérie qui sont partis un jour chassés par l´occupant, par la misère, par le parti unique, l´injustice et la dictature et qui ont planté leurs tentes aux quatre coins du monde. Comme c´est attendrissant ! Ces larmes qu´on essuie pudiquement. Mais ces retrouvailles fortifient les exilés. Ils se sentent plus fort, eux qui ont été oubliés jusqu´à la tourmente des années 84-86, quand les Canaques ont demandé leurs droits aux Français. Au fait, cheikh El Hasnaoui est mort ignoré dans l´île de la Réunion. Mais ceci est une autre histoire. Un hommage posthume au correspondant d´El Moudjahid au Brésil, qui a essayé de retrouver dans cette partie du monde des Algériens partis en 1930. Il s´appelait Lounès.