Le retard serait l'oeuvre de cercles intéressés par l'instrumentalisation de la Kabylie lors de la présidentielle de 2004. La présidence de la République devrait inviter le mouvement citoyen des ârchs à la mise en oeuvre de la plate-forme d'El-Kseur au courant de la semaine prochaine, apprend-on de sources sûres. Le communiqué de la présidence de la République, dont la diffusion était prévue jeudi prochain, avant d'envisager son report jusqu'à dimanche, pour des raisons ayant un rapport avec le calendrier présidentiel, devra se distinguer par son caractère explicite quant à la position de la première institution de la République vis-à-vis du document rédigé le 11 juin 2001 à El-Kseur, explicité à Larbaâ Nath Irathen et décrété «scellé et non négociable» lors du conclave de M'chedallah, les 26 et 27 septembre 2001. Cette information intervient au moment où une cacophonie sans précédent s'est installée au sein du mouvement citoyen quant à l'interprétation à donner à la déclaration sanctionnant le dernier conclave de l'interwilayas des 26 et 27 juin à Amizour. Une déclaration dans laquelle il est demandé à ce que «le premier magistrat du pays se prononce en engageant l'Etat pour la satisfaction de la plate-forme d'El Kseur scellée et non négociable». Il est ajouté que ce n'est qu'après que le mouvement enclenchera des discussions pour arrêter les modalités de mise en oeuvre du dialogue. Le délégué de l'interwilayas, Ali Gherbi, déclarait la semaine dernière dans les colonnes de L'Expression que «nous avons dit oui à Ouyahia», en réponse à son offre de dialogue même s'il constate la poursuite des pressions sur les délégués à travers la justice. De son côté, Belaïd Abrika, délégué de Tizi Ouzou, a déclaré dans une interview accordée au journal on-line kabyle.com: «Si nous avons des gages de garantie, nous allons instaurer les mécanismes de mise en oeuvre du dialogue. Mais si nous constations un changement de position ou des blocages, nous reviendrions à la base pour lui rendre compte que nous avons été mandatés pour mettre en place la plate-forme d'El-Kseur.» A propos de gages, il faut signaler que les représentants du mouvement sont toujours dans l'attente de la levée des poursuites judiciaires sur un bon nombre de délégués ainsi que la clôture des dossiers de justice pour les délégués incarcérés. En outre, des divergences à peine voilées persistent entre les délégués de l'interwilayas au sujet de certaines questions qui intéressent au premier plan les partis politiques incrustés dans le mouvement citoyen. A ce propos, la question de la dissolution des assemblées élues (APN et APC) dont leur renouvellement s'est fait sur fond de violence en Kabylie continue d'attiser les querelles, notamment entre les délégués indépendants et leurs collègues du RCD. Le parti du Dr Saïd Sadi s'étant confondu au mouvement, surtout depuis le retrait du FFS la veille des élections locales et sa participation à ces joutes, ne désespère pas de revenir sur la scène en désavouant une seconde fois le parti de Hocine Aït Ahmed, après le premier revers subi le 10 octobre dernier. Des assurances auraient été données à ce parti quant à de nouvelles élections locales et parlementaires après la présidentielle. Ce qui expliquerait vraisemblablement que le rendez-vous du mois de juin donné par le ministre de l'Intérieur quant à l'organisation d'élections partielles dans les 63 communes dont le scrutin n'a pas été validé l'année passée a été occulté. Nonobstant ces assurances, les délégués affiliés au RCD continueraient à faire de la résistance au dialogue sous prétexte de retour à la base pour prendre son avis sur les suites à donner à l'offre du pouvoir. A la lumière de ce qui précède, il semble que le dialogue attendu pour la mise en oeuvre de la plate-forme d'El-Kseur piétine en raison de l'existence de forces aussi bien dans les sphères du pouvoir qu'au sein même du mouvement des ârchs qui seraient intéressées de retarder son avènement jusqu'au lancement de la campagne électorale pour la présidentielle de 2004. Ce qui conforte la conviction que les thèses de la neutralisation de la Kabylie ou de son instrumentalisation nouvelle aux fins de règlement de conflits interclaniques ne seraient pas de simples vues de l'esprit.