Un autre report qui profite aux relais du pouvoir en Kabylie. Le communiqué de la présidence de la République invitant les ârchs à la mise en oeuvre de la plate-forme d'El-Kseur qui était prévue pour aujourd'hui, selon des sources généralement bien informées, risque d'être retardé. Il semble que la persistance des tiraillements au sein de la Coordination des ârchs daïras et communes de Tizi Ouzou (Cadc) soit derrière ce retard. Pourtant, le ministre de l'Intérieur Yazid Zerhouni, qui ne rate pas une occasion pour mettre de l'huile sur le feu de la crise en Kabylie, a tenu des propos conciliants hier à Constantine. Le responsable du département de l'Intérieur a en effet déclaré, lors d'une rencontre avec la presse, que le dénouement de la crise de Kabylie était proche. Interrogé sur les élections partielles, le ministre qui avait annoncé leur tenue pour le mois de juin passé, a laissé entendre cette fois-ci que la question serait tranchée à l'occasion du dialogue en vue entre les ârchs et le pouvoir. Pour rappel, l'interwilayas du mouvement citoyen des ârchs d'Amizour n'a pas manqué de soulever la question de l'«illégitimité» des institutions élues. Sans aller jusqu'à exiger leur dissolution pure et simple, comme le voudrait le RCD, les ârchs auront tout de même laissé entendre au pouvoir que l'amorce d'un dialogue sérieux ne pourrait se faire sans trouver de solution à cette question. Ali Gherbi, le délégué de l'interwilayas d'El-Kseur nous a même fait savoir que la dissolution des APC et de l'APN fera l'objet de discussions avec les pouvoirs publics lors des contacts préliminaires au dialogue pour la mise en oeuvre de la plate-forme d'El-Kseur. Mais le pouvoir l'entendra-t-il de cette oreille? En partant du fait que le boycott des élections législatives et locales de 2002 par les ârchs avait un objectif délibéré de provoquer une crise institutionnelle. Et la crise est bien là. De l'avis de tous, la situation dans les communes pourvues en exécutifs n'a rien à envier à celles qui en sont dépourvues. Cela dit, la situation qui prévaut au sein de la Coordination des ârchs daïras et communes de Tizi Ouzou (Cadc) ne milite guère pour la sortie de crise. Des informations venant de cette wilaya indiquent que le conclave de la Cadc prévu à Iferhounen est reporté. Un report de plus qui devrait profiter aux relais du pouvoir en Kabylie - une certaine élite politique, des hommes d'affaires connus et des pans de l'administration compris - qui ont intérêt à ce que la crise perdure jusqu'à la présidentielle de 2004. Par ailleurs, on indique que le calendrier présidentiel chargé serait également responsable du retard dans l'amorce du dialogue. En effet, après une multitude de voyages à l'étranger, le chef de l'Etat, dont l'engagement solennel est exigé par les ârchs pour le dialogue, s'est engagé dans une série de sorties à l'intérieur du pays sur fond de campagne électorale pour sa réélection pour un second mandat. D'aucuns estiment que la crise de Kabylie devrait être au coeur des préoccupations du premier magistrat du pays. Enfin, la comparution d'Abrika et ses camarades devant la justice hier dans un contexte où était censée régner la confiance mutuelle amène les ârchs à penser que le pouvoir continue à pratiquer la politique de la carotte et du bâton envers les délégués du mouvement citoyen. A fortiori, que la tendance lourde du mouvement est acquise à l'idée d'un dialogue sérieux et responsable pour le règlement de la crise qui perdure depuis 28 mois.