Des dissensions sont apparues quant à la nécessité ou pas de confirmer les choix faits par le président de la République. Le dernier mouvement opéré par le président de la République dans le corps des magistrats ne va pas sans couacs et les luttes opposant les deux ailes actuelles du FLN s'affrontent de nouveau au sein du Conseil supérieur de la magistrature. Ce dernier est, en effet, appelé à avaliser, comme le stipule la loi, les nominations faites par le président de la République, par ailleurs président du Conseil supérieur de la magistrature et premier magistrat du pays. Des dissensions sont apparues au sein du Conseil supérieur de la magistrature quant à la nécessité ou pas de confirmer les choix faits par le président de la République. Certains membres du Conseil affirment qu'ils sont mieux placés pour proposer les noms répondant aux critères qu'exigent les différentes fonctions du barreau, notamment celles de président de cour ou de tribunal, etc. Ces critères portent aussi bien sur l'ancienneté, la qualification, la possession de diplômes requis que sur l'expérience. L'avis du conseil est-il absolument indispensable ou bien n'est-il que consultatif? Il y a en tout cas des traditions qui existent dans le corps de la magistrature: le chef de l'Etat consulte le Conseil avant d'opérer tout changement, mais il semble que pour la dernière fournée des nominations, il a passé outre à la procédure habituelle, et c'est cela qui a créé un malaise et qui pousse certains, pas nécessairement des pro-Benflis, à se rebiffer et à refuser d'entériner les décisions prises ailleurs. Au moment où l'on parle le plus de l'indépendance des juges, et donc de la justice, cette poussée des fièvre, du côté du Conseil supérieur de la magistrature, vient rappeler que la décision prise par la cour d'Alger d'interdire en tout lieu la tenue du congrès extraordinaire du FLN n'arrête pas de faire des vagues et que les sorties médiatiques de l'ex-président de la cour d'Alger, M.Zitouni, et de l'ex-président du syndicat national des magistrats, M.Ras El Aïn, sont loin d'être des actes isolés. Ces dissensions mettent en relief l'aspect partiel des changements opérés, amenant ses membres à se poser des questions justement sur la finalité d'un mouvement non achevé. Quelque part, ils voient dans ces changements des arrière-pensées politiques qui sont mal venues dans un corps qui doit être à l'abri des luttes partisanes. Pour sa part, depuis son arrivée au palais d'El Mouradia, le chef de l'Etat n'a pas cessé de réclamer, de récupérer toutes ses prérogatives, notamment celles de nommer aux hautes fonctions de l'Etat et de l'administration. Ce qui est remarquable ici, c'est que personne ne lui conteste ce droit, bien au contraire, mais certains attirent son attention sur la nécessité d'y mettre les formes et de respecter les procédures en vigueur. La consultation d'une instance comme le Conseil supérieur de la magistrature fait partie de ces procédures. Le fait que les réserves des membres contestataires du conseil n'aient pas été médiatisées indique qu'il n'est pas dans leur intention d'envenimer les choses ni d'entrer en conflit ouvert avec la présidence de la République à l'approche d'une échéance électorale importante, les juges étant justement chargés de veiller à la régularité du scrutin. Par ailleurs, l'implosion du Syndicat national des magistrats inciterait plus d'un à faire preuve de prudence, le Conseil supérieur de la magistrature n'étant pas un syndicat mais plutôt une structure consultative chargée d'assister et d'éclairer le président de la République, lui-même premier magistrat du pays. On ne peut donc pas parler de fronde au sein du Conseil, mais plutôt de réserves qui s'appuient sur des points de procédure. Mais comme dans le monde judiciaire, la procédure est aussi importante que le droit lui-même et que les juges attachent autant d'importance à la forme qu'au fond, cette nouvelle affaire politico-judiciaire risque de se perdre dans les méandres procéduraux de la période pré-électorale.