Les nouvelles recrues semblent pousser l'audace à l'extrême. Un «service renforcé» de la police se met en place depuis plusieurs jours au niveau des centres urbains et des places publiques dans la capitale. Avec 5 policiers assassinés et 2 repentis abattus, en l'espace de quelques semaines, en plein centre d'Alger, et en plein jour, les responsables du Département recherche et sécurité et de la police ont du souci. Depuis l'assassinat des deux policiers à Belouizdad jusqu'à celui, il y a quelques jours, de deux autres dans la rue Addis-Abeba, les services de sécurité se confrontent aux mêmes difficultés d'identification. Il s'agit vraisemblablement de tueurs jeunes, audacieux, non fichés par les Renseignements généraux et appartenant à de nouveaux effectifs du GSPC de l'Algérois. Habillés en t-shirt, jean's et baskets, il s'agit aussi de Monsieur-tout-le-monde qui passe inaperçu et perfore comme du gruyère les quartiers de la capitale, grâce aux dizaines de fausses cartes d'identité falsifiées, ou volées à des citoyens. Connaissant tous les recoins de la capitale, ces nouveaux hommes du GSPC ont vraisemblablement adopté de nouvelles formes de terrorisme lequel subit des mutations pour faire échec au quadrillage rigoureux de la capitale. Si une semaine après l'attentat de Belouizdad, qui a coûté la vie à deux policiers en faction, un portrait robot avait été dressé, on a dû vite déchanter, car les descriptions données et le visage constitué par les ordinateurs de la police judiciaire ne correspondaient à aucun terroriste recherché et connu jusque-là. Un troisième policier avait été abattu quelques semaines plus tard au vieux quartier de Laâqiba, toujours dans la circonscription de Belouizdad, sans qu'il soit possible d'établir un portrait robot fiable ou de mettre un nom dessus. Les deux jeunes qui ont accosté puis abattu l'imam d'El-Harrach, Abdennacer Abou Hafs (un ancien chef du GIA rangé depuis sa libération de la prison de Serkadji) en plein jour, sont tout aussi inconnus des RG. Selon une source sécuritaire, il s'agit vraisemblablement de «deux groupes distincts et autonomes l'un de l'autre, chargés de tuer des policiers et récupérer leurs armes, et d'assassiner des repentis». La revendication de l'assassinat de l'imam d'El-Harrach avait été annoncée par un communiqué du GSPC et signé par Nabil Sahraoui, dans lequel la mort d'Abou Hafs a été justifiée par sa «haute trahison». Bien qu'il n'ait jamais fait partie du GSPC, l'imam a été un chef du GIA pré-structuré entre janvier et octobre 92 et a fini sa trajectoire islamiste en appelant à la paix civile et en activant pour faire descendre les hommes du GSPC des maquis. L'assassinat du repenti de Bachdjarah a été édicté par le fait que celui-ci avait été dans les maquis du GSPC avant de se rendre aux autorités et dénoncer ses anciens compagnons. Crime de «ridda» (apostasie) dans les principes théologiques politiques du GSPC, et passible, donc, de la peine de mort. Le dernier double assassinat des deux policiers de faction, survenu à Addis-Abeba est plus troublant. Il s'agit là d'un attentat survenu en plein centre d'une rue super-quadrillée, en plein jour, dans une attaque qui a mené les deux tireurs jusqu'au véhicule en stationnement des policiers, et quelques semaines seulement après que le consulat de la Grande-Bretagne eut quitté le bâtiment qu'il occupait juste à côté, suite à des informations ve-nues de Londres et portant sur «l'éventualité d'une attaque terroriste». Les nouvelles recrues du GSPC se mettent à niveau des techniques de sécurité de 2004, et les transformations subies depuis l'anéantissement du «groupe des trois», abattu il y a deux ans, mettent les responsables de la sécurité intérieure en état d'alerte. Il est bien dommage que le terroriste abattu il y a quelques jours sur les hauteurs du Télemly, soit mort sans avoir livré des noms ou décrit des attentats à venir. A l'heure où la tendance politique est à l'optimisme sécuritaire, les responsables de la police, du DRS et des RG savent que la course contre la montre est déjà lancée.