Quels sont les secteurs qui seront touchés par la rigueur? A bien suivre les déclarations de l'Exécutif on serait tenté de dire que cette crise est une rumeur. Suggéré, chuchoté, remanié, rectifié ensuite...silence. Une véritable Arlésienne ce plan d'austérité auquel est confronté le gouvernement. Les bégaiements qui accompagnent son annonce et la grande réticence pour son application sont des signes probants d'une grande panique à bord. L'optimisme ostentatoire du gouvernement a laissé la place au tâtonnement. De bâbord à tribord, les préposés au gouvernail naviguent à vue et semblent totalement dépassés. Au lendemain de la tenue d'un mini Conseil des ministres, à la mi-décembre 2014, on chuchotait l'ébauche d'un plan. Il fallait trouver la meilleure manière d'amortir les effets de la crise sans pour autant trop toucher aux transferts sociaux. Alors les prix du baril chutaient avec une incroyable vitesse, le gouvernement panique et finit par admettre la réalité d'une crise aiguë. Et c'est le 24 décembre dernier, que le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a lâché le morceau. Par une déclaration inattendue, il assomme l'opinion. En marge de l'inauguration de la 23e foire de la production nationale, M.Sellal a annoncé que le recrutement sera gelé en 2015 dans tous les secteurs de la Fonction publique, soulignant toutefois que le niveau de vie des citoyens ne sera pas affecté. Cette décision, explique-t-il, s'inscrit dans le cadre des mesures prises par le gouvernement pour «la bonne gouvernance en général et le bon fonctionnement des administrations». Médusée, déroutée, l'opinion publique ne savait plus quel crédit donner à ces déclarations qui tranchent avec des années d'optimisme, de promesses et d'assurance. Alors que ces questionnements fusaient, la presse révèle une instruction confirmant les appréhensions de l'opinion. Sans la rendre publique, le Premier ministre a adressé, le 25 décembre, une instruction portant gel des recrutements au sein de la Fonction publique durant l'année 2015. La presse rapporte alors que ces décisions ont été prises lors du dernier Conseil interministériel restreint présidé par le chef de l'Etat. Levée de boucliers, panique et les ministres réagissent chacun pour son secteur et Dieu pour tous. La ministre de l'Education apporte un démenti à la radio. Mme Benghebrit a rappelé que l'Education nationale «n'est pas concernée par cette mesure étant un secteur stratégique qui a besoin de combler les postes vacants estimés pour l'année scolaire 2015-2016 à 7000 enseignants, les trois cycles confondus». Elle confirme ainsi, que le concours de recrutement des enseignants prévu en mars 2015, «se déroulera dans les délais fixés contrairement aux rumeurs concernant la suspension des recrutements dans la Fonction publique dans le cadre de la politique du gouvernement pour faire face à la chute des prix du pétrole». Le ministre de l'Habitat, Abdelmadjid Tebboune, prend le relais et rassure que la chute des prix du baril de pétrole n'affectera nullement son secteur. «Le logement ne sera pas touché par l'austérité. Tout ce qui a été inscrit sera réalisé jusqu'au dernier centimètre carré!», s'est engagé M.Tebboune au nom du président de la République, Abdelaziz Bouteflika. «Le président Bouteflika a maintenu le prochain plan quinquennal 2015-2019. On ne touchera pas à ce plan, le 1,6 million de logements inscrits est maintenu», a-t-il assuré, en soutenant que cette annonce n'était pas de la démagogie. «On n'essaye pas de calmer la rue ou acheter la paix sociale. On a les moyens de notre politique», certifie-t-il. S'ensuivent alors, les ministres de l'Agriculture, Nouri, des Transports, Amar Ghoul... et la liste continue. Et c'est dans cette dynamique de freinage que le Premier ministre est revenu à la charge pour calmer les choses dans une interview accordée à l'agence officielle l'APS, le 6 janvier dernier. M.Sellal fait marche arrière et annonce que la décision de différer les recrutements dans la Fonction publique «ne concernera pas certains secteurs socio-économiques importants comme l'Education nationale, l'enseignement supérieur, la formation professionnelle et la santé». Le Premier ministre a même souligné qu'«il est prévu, au contraire, un renforcement de l'encadrement dans les secteurs stratégiques». Donc finalement, aucun secteur ne sera touché et à bien suivre les déclarations de l'Exécutif on serait tenté de dire que cette crise est une rumeur. Une démarche chaotique. On comprend qu'il ne fallait affoler davantage les populations, mais la vérité se dit même à dose homéopathique, elle ne se cache pas. Question lancinante: dans quelle niche financière puisera l'Etat pour contrer les effets de la chute des prix du pétrole sur l'économie nationale? Mystère et boule de gomme.