A Boumerdès, on tente comme on peut de vaincre sa peur. Boumerdès, ville meurtrie par le séisme de l'année dernière, n'en finit pas de retenir son souffle. Hier, la panique survenue à la suite de la secousse qui a frappé à 9h 30 à une quinzaine kilomètres au nord-ouest de la ville, a fait une quarantaine de blessés essentiellement parmi la communauté estudiantine notamment dans les cités universitaires. Au secteur sanitaire de Boumerdès-Thenia, les blessés se bousculaient au service des urgences, sans pour autant semer l'anarchie et la confusion, comme cela a été le cas lors du tragique tremblement de terre de mai 2003. «On suivait tranquillement les cours avant que la terre ne tremble sous nos pieds provoquant des scènes de panique indescriptibles» témoigne un jeune étudiant à l'Institut national des hydrocarbures (INH). Ce dernier affirme que de nombreux blessés ont été enregistrés à travers l'ensemble des instituts et cités universitaires que compte cette métropole. D'après un autre témoignage d'un employé à la cité universitaire des 800 logements, si le plus grand nombre des blessés a été enregistré parmi les étudiants c'est parce que ces derniers, ceux, particulièrement, résidant dans les cités universitaires n'ont pas eu l'expérience de vivre de telles situations. Par contre, si, en effet, la terreur avait, de ce fait, jeté l'effroi parmi cette communauté, les habitants de la cité du 1er-Novembre, en plein centre-ville, eux, comme ceux d'ailleurs des autres habitations collectives de la ville qui ont subi de plein fouet les affres du séisme du 21 mai 2003, n'ont pas paru, à notre grande surprise, affectés par la secousse qui, durant quelques secondes, a fait trépider la ville et ses environs. Dehors, aux alentours des 1200 Logements, la cité qui a payé un lourd tribut lors du fameux drame, aucun signe de branle-bas ni même de panique n'a été constaté. Les principales artères et habitations de Boumerdès donnaient, au contraire, l'image d'une ville qui retrouve, peu à peu, ses vieilles habitudes. «Les gens à Boumerdès, se sont japonisés. Le séisme est entré dans nos moeurs», ironise, Saïd T., 25 ans, travaillant comme web master dans une société d'informatique, pour dire, en fait, à quel point les Boumerdasis se sont habitués à l'activité sismique qui a connu, il faut le dire, un certain regain, depuis la semaine précédente. «Prenant la fuite sitôt la secousse ressentie, les gens, une fois la peur passée, ont tous fini par regagner leurs domiciles» se rappelle son ami, Idir B., un jeune commerçant de 27 ans qui semblait, curieusement, être content en avançant pareille certitude. Mais la «japonisation» qui paraît ainsi gagner l'ensemble des résidents cache mal néanmoins un climat de stress, d'angoisse voire de dégoût qui s'est emparé de ces derniers depuis la secousse qui frappé la ville, mercredi dernier, en début de soirée. «Nous sommes fatigués, désabusés de ces répliques qui ne s'arrêtent pas apparemment» lâche Saïd qui, à son corps défendant, s'en remet à la Providence. «La nuit, chacun est sur ses gardes. Nous passons des moments cauchemardesques. Mais que voulez-vous qu'on fasse ?La nature dicte sa loi» concède pour sa part son voisin Idir. Visiblement fatigués nos deux jeunes interlocuteurs, comme beaucoup d'autres à Boumerdès, prennent leur mal en patience. «Il n'est pas question de quitter nos maisons» répond le premier à notre question sur ce que les habitants entendent faire au cas où les secousses persisteraient. Au lendemain du séisme meurtrier du 21 mai qui a fait plus de 1500 morts seulement à Boumerdès, la plupart d'entre les résidents de la cité du 1er-Novembre se sont alors réfugiés des mois durant dans les tentes, puis dans les chalets avant de regagner définitivement leurs domiciles. «Mais cela reste possible au cas où un autre séisme touchera comme en 2003 la ville», pense néanmoins Saïd. En clair, à Boumerdès, dès qu'on essaye de tourner la page tragique du tremblement de terre du 21 mai dernier, une série de secousses de moindre intensité pourtant, font vibrer le sol de cette ville, dans laquelle l'on reste tout de même sur le qui-vive.