Le chef de la zone autonome d'Alger Un procès pour diffamation sera intenté par Saâdi contre le journaliste franco-américain. Le journaliste franco-américain Ted Morgan alias Comte Sanche Charles Armand Gabriel de Gramont a raconté, à sa façon, la «bataille d'Alger», que Christophe Forcari appelle dans Libération, et à juste titre «Une guerre si vile.» La vilénie de cette guerre vient également du fait que l'auteur, Ted Morgan, n'oublie pas d'informer ses éventuels lecteurs, d'une façon cynique, qu'il a été partie prenante dans la «Guerre d'Algérie», avec le grade de sous-lieutenant, au sein d'un régiment sénégalais de l'infanterie coloniale... Il n'oublie pas non plus de révéler, toute honte bue, «qu'il a commis un crime de guerre après avoir frappé un prisonnier jusqu'à le tuer pour le faire parler». C'est en ces termes précis que Yacef Saâdi, responsable politico-militaire de la Zone autonome d'Alger (ZAA), a entamé hier, lundi une «mise au point» aux révélations pour le moins fracassantes quant aux fabulations du journaliste auteur du livre «Ma bataille d'Alger» concernant les circonstances exactes des événements qui ont conduit à l'odieux assassinat par le biais d'explosifs des patriotes Ammar Ali, du nom de guerre de Ali la Pointe, de Hassiba Ben Bouali et de P'tit Omar Yacef, neveu de Saâdi, et Mahmoud Bouhamidi reclus dans leur cachette au 5 rue des Abderames dans la Haute Casbah d'Alger. L'argument-force de Yacef Saâdi tient dans les attestations d'officiers français sur l'identité de l'agent double qui a noyauté l'organisation de la Zone autonome d'Alger. Le nom de Hacène Ghendriche, dit Zerrouk cité plusieurs fois dans les rapports de l'armée française, détruit les assertions de l'officier franco-américain versé dans la propagande de l'armée coloniale, lorsqu'il avait exercé à Alger. Evoquant dans le détail les échanges épistolaires entre Ali la Pointe et Ghendriche, Yacef Saâdi a souligné que la dernière note du chahid avait été écrite le jour même de la découverte de sa planque. Entouré par plusieurs membres de sa famille, dont en particulier son fils et sa fille qui ont animé avec beaucoup de ferveur cette conférence de presse, le patron de la ZAA, documents authentiques à l'appui, a estimé que si Morgan «a le droit de s'exprimer...il n'a nullement ce droit d'aborder un sujet pour lequel il n'avait pas tous les tenants et les aboutissants, encore moins les archives crédibles qui lui permettent de s'attaquer vertement, aujourd'hui, à des personnages avec lesquels il n'avait aucun contact». Saâdi lancera à Morgan: «Vous étiez, pendant notre glorieuse Révolution, soldat de propagande...je serai plus à l'aise pour vous démontrer que vous faites fausse route avec le patriote, que je fus, que je suis et que je serai toujours, pourvu que Dieu me prête vie pour voir triompher la vérité que vous, et vos semblables, êtes en train d'occulter pour des buts inavoués.» Et d'ajouter: «Vos déclarations gratuites et immotivées», prennent la forme d'une «attaque frontale de mauvais aloi, éhontée, ou carrément la forme d'une pernicieuse machination, qui vous a été ordonnée par ceux qui vous emploient pour de tristes besognes», a tenu à souligner Saâdi. Et dans ces deux cas de figure, poursuit-il, en s'adressant à Ted Morgan, «avez-vous les preuves suffisantes qui vous permettent de me charger de la sorte? (...) et de qualifier les assertions contenues dans le livre Ma bataille d'Alger de mauvaise facture et d'affirmer être en possession de preuves dûment authentifiées qui annihilent les déclarations de Morgan. «Vous constaterez, a ajouté Saâdi, que j'ai cette honnêteté morale de vouloir m'expliquer, hautement, devant qui que ce soit, parce que je peux - même en étant au crépuscule de ma vie - prouver, voire conforter mon discours par des documents authentiques que je possède et d'autres, plus importants que je viens de récupérer par mes propres moyens, ces documents officiels que le commun des mortels appelle 'Archives'' et qui peuvent confondre et accuser plus d'un, sans m'éclabousser.» Le héros de la bataille d'Alger a donc décidé de rompre son silence pour que sa «position de réserve» ne puisse être interprétée autrement que par une décision de sagesse et de sérénité. «Oui, aujourd'hui, j'ai décidé en effet de me défendre en utilisant les meilleures ressources pour convaincre les Algériens, mes compatriotes, qui veulent connaître la vérité, sur toutes les causes de la mort de Ali la Pointe et ses compagnons.» Aux Algériens, Yacef Saâdi dit détenir des documents authentifiés, susceptibles de permettre «une fidèle reconstitution de toute la période où nous avons combattu obstinément contre cette «bataille d'Alger» qui nous été imposée par les forces coloniales. Pour conclure sa déclaration, le chef de la ZAA a affirmé, toujours à l'adresse de Ted Morgan: «J'ai l'intention d'utiliser les armes légales contre vous pour défendre mon honneur et l'honneur de mes compagnons, qui ne sont plus de ce monde et qui ont consenti le sacrifice suprême.» Yacef Saâdi termine sur cette phrase: «J'ai la conscience tranquille et l'âme sereine, devant le Tout-Puissant Seigneur, je vous convie à préparer votre arme de défense.» Sans commentaire.