Des commerçants doutent fort que les opérateurs nationaux puissent arriver à répondre à la totalité de la demande des besoins de la consommation nationale. Selon de nombreux commerçants affiliés à l'Anca (Association nationale des commerçants et artisans) ce n'est qu'à partir du mois de juillet prochain que l'on saura si l'interdiction de l'importation de 851 produits n'a eu aucune incidence sur l'offre et la demande du marché. D'autres, plus pessimistes, doutent fort que les opérateurs nationaux puissent arriver à répondre à toute la demande nationale en besoins de consommation de produits agroalimentaires. Ces derniers, que nous avons rencontrés lors d'une réunion organisée mercredi dernier au siège de l'Anca semblent par ailleurs convaincus qu' à partir du mois cité plus haut, une fois les stocks de produits importés épuisés, il y aura baisse de l'offre et «par voie de conséquence une hausse des prix de nombreuses denrées alimentaires conditionnées ou en vrac». Une hypothèse que partage d'ailleurs le président de l'Anca, Mohamed Boulanouar, lequel se pose aussi cette question: «Les opérateurs seront -ils en mesure d'approvisionner le marché et de satisfaire les besoins nationaux durant cette période d'interdiction d'importation?» L'autre «crainte», affichée par les commerçants, concerne la situation de monopole que provoquerait l'absence de produits importés sur le marché local. «Ainsi les industriels profiteront de cet avantage inouï et fixeront à leur guise les prix sans s'attarder, toutefois, sur la qualité dès lors qu'ils seront assurés que leur production sera écoulée dans l'immédiat», nous a fait remarquer un grossiste de la place d'Alger que nous avons pu joindre par téléphone. Autant d'hypothèses que réfute Abderrahmane Benkhalfa. En effet cet économiste et ex-ministre des Finances soutient que cette mesure d'interdiction d'importation, va au contraire encourager la production locale. Comme il a estimé, lors de son intervention au cours des débats à la journée d'information sur la loi de finances 2018 et son impact sur l'entreprise, organisée jeudi dernier à Alger par la Chambre algérienne de commerce et d'industrie (Caci), que cette mesure ministérielle «est une aubaine pour les producteurs nationaux». Et de préconiser dans ce sens «la substitution à ces importations la production locale dans les deux années à venir», un objectif qui semble à la portée des opérateurs versés dans le secteur de l'agroalimentaire pour peu que ces derniers investissent dans ce but. Avec une multiplication de leur capacité de production, le défi peut être relevé. Notons que Benkhalfa a souligné dans son intervention que l'Etat, à travers cette loi de finances 2018, a introduit deux instruments devant permettre de réduire les importations. Rappelant par ailleurs que les deux mesures de la LF 2018 portent sur l'élargissement de la liste des marchandises soumises à la taxe intérieure de consommation (TIC), au taux de 30%, à 10 familles de produits finis, ainsi que le relèvement des droits de douanes, pouvant atteindre 60%, pour 32 familles de produits finis. Selon les estimations de cet économiste, ce dispositif est susceptible de «libérer un marché de 15 à 20 milliards de dollars en faveur de l'entreprise locale». Cela dit, il convient de faire savoir que les produits soumis à une interdiction d'importation ont représenté durant les 10 premiers mois de l'année écoulée près d'un milliard et demi de dollars. Concernant la durée de l'interdiction d'importation, le ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi, avait lors de l'une de ses récentes sorties médiatiques, indiqué que «la liste pouvait connaître des allégements comme elle peut être enrichie» mais il avait toutefois précisé que «l'importation de certains produits sera suspendue complètement et définitivement». Il avait cité en exemple «certains produits de luxe qui alourdissent la facture des produits importés», à l'instar des graines de tournesol dont la valeur d'importation a atteint 25 millions de dollars, de la mayonnaise (20 millions de dollars) et du chewing-gum (25 millions de dollars).