Les tensions entre la Turquie et la Russie au sujet de la Syrie doivent inciter Ankara à se rapprocher de l'Occident, en particulier de Washington, a estimé, hier, un haut responsable du département d'Etat américain. En dépit d'un accord de désescalade entre Ankara et Moscou, le régime syrien mène une offensive avec l'appui de l'aviation russe dans la province d'Idleb contrôlée par des groupes rebelles et des terroristes. L'intensification des bombardements à Idleb a donné lieu ces derniers jours à des échanges acrimonieux entre Ankara, qui soutient des groupes rebelles, et Moscou, allié de Damas. Ces désaccords compromettent le rapprochement que les présidents turc Recep Tayyip Erdogan et russe Vladimir Poutine ont scellé après une grave crise diplomatique en 2015 et qui a culminé avec une étroite coopération sur le dossier syrien en dépit d'intérêts divergents. «Nous aimerions certainement voir la Turquie s'aligner plus directement et clairement avec l'Otan (dont Ankara est membre), avec les Etats-Unis, et avec l'Occident en réaction au rôle destructeur de la Russie dans la région, en particulier en Syrie actuellement», a déclaré le responsable, qui a requis l'anonymat, à un groupe de journalistes à Istanbul. «Je crois que ce que nous voyons en Syrie et en Libye, en particulier, montre à quel point les intérêts de la Turquie et de la Russie ne se recoupent pas et j'espère que nos partenaires turcs vont en tirer la même conclusion», a-t-il ajouté. Comme en Syrie, la Turquie et la Russie soutiennent des camps opposés en Libye où Ankara s'est allié avec le gouvernement de Tripoli reconnu par l'ONU alors que Moscou est accusé d'appuyer l'homme fort de l'Est, Khalifa Haftar. Les forces de ce dernier bénéficient du soutien de la compagnie de sécurité russe Wagner, décrite par le haut responsable américain comme «un instrument du Kremlin». Concernant la Syrie, le responsable américain a estimé que la Russie «croit en une solution militaire du conflit», mais il a souligné qu'une telle issue «irait à l'encontre des intérêts de la Turquie à Idleb et en Syrie, plus généralement». «Les intérêts de la Turquie et des Etats-Unis se recoupent beaucoup plus que ceux de la Turquie et de la Russie. Le partenaire de la Turquie, son allié, ce sont les Etats-Unis et non pas la Russie», a-t-il insisté. Mais en dépit des récentes tensions la Turquie n'a pas donné d'indication à ce stade d'une quelconque volonté de revoir à la baisse sa coopération avec Moscou, a affirmé le responsable américain, citant notamment le refus catégorique d'Ankara de renoncer à s'approvisionner en systèmes de défense anti-aérienne S-400 russes.