Le président tunisien Kaïs Saïed, qui s'est attribué le 25 juillet dernier,les pleins pouvoirs, après avoir mis fin au gouvernement Mechichi et suspendu les activités de l'Assemblée des Représentants du Peuple (ARP, Parlement), a décidé de dissoudre le Conseil supérieur de la magistrature, organisme indépendant chargé de nommer les juges, en l'accusant d'être partial et au service de certains intérêts. «Le CSM appartient au passé à partir de ce moment», a déclaré dimanche le président dans une vidéo diffusée dans la nuit où on le voit discuter avec des ministres. Il y accuse aussi cet organe constitutionnel indépendant de corruption et d'avoir ralenti des procédures, dont les enquêtes sur les assassinats de militants de gauche survenus en 2013. Selon les observateurs, il vise ainsi le parti Ennahdha qui a contrôlé le Parlement et les différents gouvernements, depuis la révolution de 2011 et la chute de l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali. Saïed concentre tous les pouvoirs depuis le 25 juillet, quand il a limogé le Premier ministre et gelé jusqu'à fin 2022 le Parlement, une décision qualifiée de coup d'état par Ennahdha et d'autres opposants. Il a depuis nommé un gouvernement tout en légiférant par décrets. Mi-décembre, il a annoncé un référendum cet été pour réformer la Constitution et des élections législatives en décembre. Le «mouvement du 25 juillet», qui regroupe ses partisans, avait appelé samedi le président Kaïs Saïed à dissoudre le CSM pour «purger» le pouvoir judiciaire de «magistrats corrompus». Le président a assuré «travailler sur un décret provisoire» pour réorganiser le CSM. Il y a quelques semaines, il avait déjà retiré un certain nombre d'avantagesaux membres du CSM. «Malheureusement dans ce pays, certains juges dans les tribunaux ont manipulé le dossier Chokri Belaid», a dénoncé Saïed, à propos d'un dirigeant de gauche tué de trois balles devant son domicile le 6 février 2013. Une importante manifestation est prévue aujourd'hui à Tunis pour commémorer l'assassinat de ce militant et celui de Mohamed Brahmi, tué dans des circonstances similaires le 25 juillet 2013. «Ce n'est pas le premier procès où ils essaient de cacher la vérité depuis des années», a ajouté le président Saïed. «Dans ce conseil, les postes et les nominations se vendent et se font selon les appartenances», a affirmé le chef d'état, en ajoutant: «vous ne pouvez pas imaginer l'argent que certains juges ont pu recevoir, des milliards et des milliards». Pour lui, «la place des juges (du CSM) n'est pas là où ils se trouvent mais sur le banc des accusés». Par ailleurs, la Tunisie compte émettre un emprunt national obligataire afin de couvrir une partie des besoins du budget de l'état pour l'année 2022, selon un décret présidentiel publié samedi au Journal officiel tunisien. La souscription à cet emprunt obligataire national et son remboursement se feront en dinar tunisien, à travers des comptes ouverts chez les intermédiaires agréés administrateurs, parmi les sociétés d'intermédiation en bourse et les banques. Selon le décret présidentiel, cette souscription sera effectuée sur quatre tranches. La date d'ouverture et de clôture des souscriptions, les caractéristiques et les conditions d'émission pour chaque tranche seront fixées par arrêté du ministre chargé des Finances. Les tunisiens non résidents ont la possibilité de souscrire et d'acquérir les titres de l'emprunt en dinar tunisien, par débit de leurs comptes étrangers ouverts chez les banques en devise ou en dinar convertible ou par virement bancaire de l'étranger. Selon un rapport du budget de l'état de 2022, l'état tunisien doit émettre un emprunt obligataire national afin de mobiliser 1.400 millions de dinars et d'un bon de trésor de 52 semaines afin de fournir 800 millions de dinars. La Tunisie table également sur les bons de trésor assimilables BTA afin de mobiliser 3.560 millions de dinars et sur un crédit bancaire syndiqué en devises afin de mobiliser 1481 millions de dinars.