Des fleurons de l'industrie kabyle sont en très mauvaise posture. Les deux usines phares de Kabylie, la Cotitex de Draâ Ben Khedda et la Socothyd des Issers sont à l'agonie. Ces deux pôles industriels qui employaient des milliers de travailleurs, ne sont plus que l'ombre d'eux-mêmes. L'unité de la Socothyd, la moins touchée malgré ses divers problèmes, et qui fait face à la colère des travailleurs, a vu la direction de cette entreprise fermer l'unité, comme préconisé par le conseil d'administration. Le bras de fer, actuellement en cours entre le président-directeur général et les travailleurs, risque fort de mettre à mal l'entreprise. Du côté de la Cotitex, c'est carrément le silence radio. Sur place, hier, cette unité, la plus importante de Kabylie, qui employait, dans les années 1970, jusqu'à 5000 travailleurs, on nous informe que syndicats et cadres administratifs étaient absents, «partis sur Alger afin d'essayer de voir comment faire pour sauver ce qui peut l'être encore». Un travailleur, ayant requis l'anonymat, se laisse aller à des confidences d'où transparaissent des bribes de réelles angoisses. «Je ne sais pas ce qui adviendra de cette usine. Mais tout indique que la fin est proche. Les cadres et les syndicalistes sont partis ce matin (hier Ndlr) sur Alger, mais que voulez-vous qu'ils fassent, quand on sait que le chômage technique pointe à l'horizon?» De ce fait, la Cotitex semble bien malade, et aucun remède, fut-il de cheval, ne semble en mesure de lui rendre la santé. Les 1100 travailleurs restants semblent résignés à voir cette unité fermer ses portes, et d'aucuns d'expliquer que «c'est l'importation de tissus, et notamment le tissu chinois qui a tué le textile!» D'autres travailleurs se mêlent à la conversation et alors «vident leur sac». «Vous savez, il fut un temps où la vache à lait produisait et produisait bien, mais entre-temps les choses ont dérapé d'abord, et il faut bien le souligner, chaque travailleur s'employait à ´´prendre´´ quelque chose de la production. Ensuite, les gestionnaires, qui ont pris ce pli politique de distribuer des bénéfices dans une usine pratiquement tournant à perte, tout cela joint à une gestion à l'à-peu-près font que les choses se soient dégradées à ce point.» Désormais, la Cotitex de Draâ Ben Khedda se conjugue au passé. Du côté de la Socothyd, les choses sont moins désagréables, malgré tout, car elles se résument à un bras de fer entre les travailleurs et le président-directeur général. Ces derniers réclament le départ du principal responsable de l'unité, et, depuis le 30 octobre, les travailleurs observent une grève et interdisent l'accès de leur unité à quiconque, tant que les 20 travailleurs suspendus ne sont pas réintégrés. Ce qu'évidemment la direction refuse, car tenant absolument à traduire d'abord ces travailleurs devant le conseil de discipline. La chose semble entendue pour ces deux fleurons de l'industrie kabyle. Les travailleurs ayant, en fait, peur d'une véritable privatisation dans le cas de Socothyd et de la fermeture pure et simple dans le cas de la Cotitex, ne savent plus où donner de la tête. Ils prient, en attendant, pour que les choses s'arrangent, mais se demandent de quoi demain sera fait.