Ça chauffe pour le prix du pain. La baguette augmente sans grossir et encore moins s'allonger Le prix de la baguette de pain devrait légèrement augmenter à la rentrée sociale en raison de la flambée des cours du blé qui ont atteint un niveau record sur le marché mondial. Première conséquence, la baguette de pain passera officiellement à 10 dinars. Le prix de la semoule a déjà connu une hausse. Le sachet de 25 kg est cédé à 950 dinars. Actuellement, elle est cédée dans les boulangeries à 8,50 dinars. Deuxième conséquence directe, la bourse des ménages se rétrécit de plus en plus comme une peau de chagrin, déjà maltraitée par la flambée des prix des produits de large consommation. Le prix du blé a atteint un record historique cette semaine sur le marché de Chicago, battant son précédent plus haut niveau de 1996, poussé par une forte demande et des perspectives de production à la baisse. Le boisseau, environ 27 kg de blé, unité de poids de transaction sur le Chicago Board of Trade (Cbot), a bondi de 27 cents mercredi, clôturant à 7,1850 dollars. Si l'impact de cette hausse sur le prix de la baguette de pain est pour l'heure inconnu, il n'en demeure pas moins que l'Algérie reste «très vulnérable» selon un expert, à tout mouvement haussier enregistré sur les places internationales des matières premières. D'autant que les différentes politiques agricoles n'ont jamais tenu compte des facteurs exogènes. En outre, les surfaces emblavées ne cessent de rétrécir en raison d'une bétonisation à outrance. Aujourd'hui, l'Algérie reste vulnérable à toute spéculation. Pour un pays de plus de 2 millions de km², importer environ 1,8 milliard de dollars en produits alimentaires durant uniquement le premier semestre 2006, est une aberration qui démontre tout le manque de prévisions des personnes en charge du secteur. Certes, les fortes précipitations tombées en Europe ces derniers jours, notamment en Angleterre, en Allemagne et en France, font craindre une nouvelle réduction des récoltes de blé de ces pays, a expliqué un analyste international. A ce phénomène naturel se greffent des spéculations sur des dégâts potentiels sur la production en Australie, a-t-il ajouté. Les importateurs, qui comptaient sur les récoltes de l'hémisphère Sud, s'inquiètent des conditions «trop sèches» qui affectent les productions australes (Australie, Argentine). Contacté par L'Expression, M.Abdelmalek Serraï, expert et consultant international, estime que «deux éléments essentiels militent en faveur de cette situation, soit l'augmentation de la baguette de pain; une baisse de production suite à la sécheresse qui a touché plusieurs pays producteurs ainsi que des commandes massives émanant du Maroc et de l'Egypte qui est le plus gros importateur de blé de la planète». L'Algérie, gros importateur également et non des moindres, est particulièrement vulnérable à ces fluctuations. Elle est touchée de plein fouet par ces facteurs ainsi que par les spéculations qui gravitent autour des situations pareilles. M.Serraï avait, selon ses dires, «plusieurs fois suggéré aux décideurs de réserver une partie du budget alloué à l'importation du blé et l'insuffler en direction des agriculteurs de céréales pour développer et promouvoir leur production». En vain. Sur 1,2 milliard de dollars par an actuellement consacrés à l'importation du blé, 120 millions pourraient être versés aux agriculteurs céréaliers pour atténuer tout choc haussier. «Nous resterons, a-t-il dit, toujours victimes et il faut un programme à moyen et long terme pour s'en sortir.» Il soulignera que «les lobbies du commerce international continuent à importer au lieu d'aider les agriculteurs à améliorer leur rendement.» Et dire qu'en 1962, alors que la population algérienne était de 10 millions d'habitants, on produisait près de 26 millions de quintaux de blé. Aujourd'hui, on produit deux fois moins. Qui n'avance pas, recule et subit les conséquences. Aussi, selon Malek Serraï, l'Algérie devrait asseoir une politique agricole productrice, fiable et plus agressive «à l'image du Nigeria». L'Algérie importe tous les aliments de bétail et toutes les variétés des oléagineux car ne disposant pas suffisamment d'eau, ni de technologies à même de cultiver le soja par exemple dont la semence a donné des résultats encourageants dans les Hauts-Plateaux. Sur ce point, l'exemple de l'Arabie Saoudite est à méditer. Le Royaume wahabite a su adapter son agriculture aux nouvelles technologies. L'absence de savoir-faire et de formation dans les techniques de gestion et de culture et le manque de volonté suffisamment forte pour ce faire, estime Serraï, ont fait que l'Algérie reste dépendante des fluctuations. Aussi, «le pays gagnerait à changer de cap et à arrêter le gaspillage en revalorisant les terres», enchaîne-t-il. Il y a lieu de revoir la politique agricole en encourageant l'intégration d'universitaires - chercheurs dans ce secteur qui souffre d'un déficit chronique de techniques nouvelles de culture. Les sites agronomiques situés dans les grands espaces des Hauts-Plateaux et du Sud devraient bénéficier de programmes de production intensive. Ces terres sont favorables à ce genre de culture, souligne Malek Serraï.