Foncièrement pragmatiques, les cadres du MSP savent pertinemment que la préservation de leurs «acquis» est tributaire de leur soutien au projet de la révision constitutionnelle. Amar Ghoul, ministre des Travaux publics, s'est exprimé, en sa qualité de «citoyen algérien» en faveur d'un troisième mandat pour le président Bouteflika. En affichant publiquement ce jeudi, son avis par rapport à une question que son parti, le MSP, n'a pas encore tranchée, Ghoul vient de jeter un pavé dans la mare. Il y a là, peut-on comprendre, une manière pour ce ministre de peser de son poids aux fins d'influencer la position de son parti. Car, dit-on au sein du MSP, il y a des têtes qui voient les choses sous un autre angle. Bien qu'elle semble contraster avec les traditions de ce mouvement, rompu à la discipline partisane, l'attitude de Ghoul est révélatrice de la position qu'adoptera ce parti à l'issue de son congrès, prévu en fin mars prochain. Aux yeux de certains observateurs, la décision du MSP à propos de la révision constitutionnelle et du troisième mandat présidentiel ne fait pas mystère. Selon eux, «le MSP se prononcera certainement en faveur de ce projet pondu par le FLN et couvé depuis, par d'autres partis et organisations». C'est une question de temps. «Soltani prolonge le suspense pour bien négocier le ralliement de son parti à ce projet», ajoute-t-on. Le maintien du suspense est une vieille tactique chez le MSP. L'histoire de ce mouvement, d'obédience islamiste, regorge de précédents. A titre indicatif, lors de la présidentielle de 1999, le MSP, alors conduit par feu Cheikh Nahnah, s'est retranché derrière un long silence, avant d'annoncer son soutien à la candidature de Bouteflika. Un tour qui a pris de court une bonne partie de la classe politique algérienne qui croyait, à l'époque, que le MSP allait épauler Djaballah, le candidat d'En Nahda. Les cadres de ce parti avaient compris alors ce stratagème si bien que l'on n'assista pas à des frondes au sein de ses structures. Fondées sur l'efficacité de «l'entrisme», les positions politiques du MSP ont de tout temps reflété ses ambitions de partage du pouvoir. D'ailleurs, Bouguerra Soltani ne cesse de parler du «droit» de son parti d'avoir des walis et des ambassadeurs, à l'instar du FLN et du RND. Le président du MSP qui a fortement «sué» pour décrocher le poste de ministre d'Etat, sans portefeuille, n'a fait en réalité que se conformer au «style MSP» devenu très familier, voire incontournable dans le marchandage politique national. Il faut reconnaître à ce propos, que le principe de «l'entrisme» a donné ses fruits. Membre de l'Alliance présidentielle et partenaire au gouvernement depuis bientôt 10 ans, le Mouvement de la société pour la paix donne toutes les apparences d'un parti qui avance sur la bonne voie. Une situation dont il tire profit tout en essayant de faire endosser les échecs à ses deux alliés, le FLN et le RND. Les campagnes électorales menées par ce parti lors des dernières élections (législatives et locales), illustrent, on ne peut mieux, cette réalité. Celle d'avoir un pied au pouvoir et l'autre dans l'opposition. En fait, Soltani se livrait sans grande peine à cet exercice difficile d'équilibriste consistant à critiquer le gouvernement dont il fait partie. Une danse à deux rythmes qui a fait ses preuves bien qu'on considère, sur le plan «moralité politique», que le subterfuge du MSP est à la limite de «pratiques hypocrites». La participation dans la gestion, plus ou moins effective, des affaires du pays est des plus profitables pour le MSP. Elle lui permet de récupérer des dividendes que tirent généralement les partis proches des centres de décision. Il aura, du moins, à planter ses hommes dans les rouages de l'administration. Par ailleurs, les critiques formulées par Soltani à l'encontre de la politique du gouvernement, dont il fait partie, lui permettent de gagner la sympathie des franges sociales marginalisées. L'autre signe indiquant que le MSP finira par apporter son soutien à la révision de la loi fondamentale et du troisième mandat présidentiel, a trait directement à sa position dans l'échiquier politique. Devancé par le FNA, à l'issue des dernières locales, le MSP est «contraint» de suivre ses alliés s'il veut garder pied au sein de l'Alliance présidentielle. Foncièrement pragmatiques, les cadres du MSP savent pertinemment que la préservation de leurs «acquis» est tributaire de leur soutien au projet de la révision constitutionnelle.