En grève de la faim depuis une semaine, 15 détenus ont trouvé la liberté hier à 11 h, sans toutefois interrompre leur jeûne. L'exécution de la décision du Président de libérer les détenus du mouvement citoyen dans la wilaya de Bouira - application ayant débuté hier à 11 heures - suscite des réactions diverses allant de la satisfaction à un mutisme total. La grande majorité analyse cet acte et pense qu'il sera le déclic qui ramènera le calme dans la région. La volonté du Président de rétablir la paix et la quiétude, n'est toutefois pas perçue comme un cadeau, mais comme le résultat d'une protestation légitime qui dure depuis maintenant une année et demie et qui a engendré une centaine de martyrs. L'injustice commise à la suite de l'arrestation et de la détention, pendant plus de 6 mois d'honnêtes gens, est rectifiée par cette décision. Cette victoire n'est pas exclusive au FFS qui a, par sa position, accentué la pression, mais une victoire de la citoyenneté. Les coordinations citoyennes - Bouira se caractérisant par l'existence de deux - optent pour des positions diamétralement opposées. Pour les participants au conclave de Takerboust, la libération sans conditions des détenus, qui n'est qu'une réponse à une revendication incluse dans toutes les déclarations de l'interwilayas, peut être interprétée comme une victoire. En réponse aux opposants, notre interlocuteur se dit outré de voir émerger des personnes qui, au début du mouvement, s'étaient abstenues de prendre position, mais qui, maintenant, viennent se greffer et tentent de mener au pourrissement. A t-on le droit, au nom des victimes du printemps noir, de renier l'acquis des victimes d'octobre 88? L'autre clan, lui, préfère un discours radical et donne à l'événement le statut de simple acte électoraliste. Cette réaction n'est pas nouvelle puisque déjà avec la constitutionalisation de tamazight, cette aile du mouvement avait brandi des positions radicales et avait considéré l'événement de non-lieu. A vif et dans une première réaction, certains détenus parlent de la continuité du combat et d'activer pour empêcher l'organisation des élections jusqu'à la satisfaction de la plate-forme d'El-Kseur. Ce positionnement, qui fragiliserait le mouvement si - comme l'a demandé la direction - les partisans du FFS se retiraient des coordinations, risquerait d'éloigner l'échéance d'un dénouement. Dans les rangs des partis politiques, les réactions diffèrent. Le parti majoritaire, à l'approche des locales, veut tirer la couverture à lui en tentant de faire l'amalgame entre la décision du Président et l'invitation du Chef du gouvernement au dialogue. Pour les mouvances islamistes qui, au passage oublient que la loi sur la concorde a été décrétée par ce même Président, le geste est perçu comme une grave concession du pouvoir à l'égard de ceux qui ont tenté de porter atteinte à l'unité nationale. Etonnant raisonnement de la part de personnes que seule la détention du pouvoir intéresse. D'autres formations politiques préfèrent attendre avant de réagir. Pour rappel, Bouira comptait 15 détenus parmi lesquels 11 n'étaient pas encore jugés alors que les quatre autres purgeaient des peines d'une année d'emprisonnement ferme. Cette libération, qui a touché tout le monde, est peut-être le premier pas vers un dénouement de la crise en Kabylie. De l'avis des plus initiés, la participation du FFS, parti majoritaire dans la région, agit dans ce sens. Sera-t-il suivi du RCD? C'est, du moins, la question que se pose tout le monde.