Un atelier de réflexion et d'information a été organisé hier, dans les bureaux du CISP (Comité international pour la solidarité entre les peuples), à Kouba, autour des thèmes de la migration subsaharienne et des harragas. Les communications ainsi que deux projections ont été suivies de vifs débats. Il a été surtout question d'un diagnostic et d'un état des lieux sans pour autant que des solutions aient pu être avancées. À propos de la migration subsaharienne, deux communications ont été faites. L'une de Sara Franzoso (de l'équipe de proximité du CISP) sur le profil des migrants subsahariens dans la région d'Alger et l'autre de Mme Emmanuelle Mitte (chargée de protection UNHCR) sur les activités de l'Agence onusienne pour les réfugiés. Cette dernière a ainsi affirmé qu'il y avait 1 000 demandes d'asile en attente en Algérie précisant qu'“un demandeur d'asile doit attendre plusieurs mois avant que son statut ne soit déterminé”. Elle n'omettra pas de préciser à propos du certificat octroyé aux immigrants, l'absence d'informations des services de sécurité sans toutefois donner plus de détails. Pour les projections, il y a eu 6 minutes pour une courte version du documentaire Le piège de Djamel Benramdane et Kays Djilali ainsi que l'intégralité (22 minutes) du documentaire Harguine, harguine de Meriem Achour Bouakaz. Un travail qui a suscité l'émotion et surtout beaucoup de questionnements. Parmi les témoignages montrés dans ce documentaire (qui sera d'ailleurs diffusé jeudi prochain à la filmothèque Zinet), c'est celui du père d'un disparu qui a particulièrement ému les personnes présentes dans la salle de projections. Les larmes aux yeux, il demandait à connaître le sort de son rejeton en répétant à plusieurs reprises : “Qu'a-t-il fait ?” avant de lâcher : “Hadi ihana” (c'est une insulte). Il faut dire qu'“el-harga” (la traversée) a été la principale “attraction” des débats animés, avec habileté, par Djamel Benramdane et la journaliste Baya Gacemi. Le sociologue Zine Eddine Zemmour essaya de donner sa propre analyse sur le phénomène qu'il considère comme “une excroissance d'une société malade”. Ce chercheur du CRASC (Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle) s'“attaqua” à la presse à qui il reprocha son approche “purement sécuritaire” du phénomène. Une attitude surprenante puisque de l'avis de presque tout le monde, la presse écrite est carrément la seule qui a essayé plus au moins d'aborder ce sujet en dehors des “tortillements”. Le manque d'étude de terrain des sociologues (et autres) a été souvent évoqué, mais vraisemblablement on se contente toujours des paroles sans les actes concrets. Une question que le chargé de communication du CISP a aussi mentionné en ajoutant “pourtant el-harga existe depuis plusieurs années”. En essayant d'apporter sa propre analyse, Baya Gacemi précisera que la migration clandestine, c'est toujours pour les mêmes raisons, “que ce soit ici ou ailleurs”, avant d'ajouter que c'est surtout parce que “nos sociétés n'offrent plus d'avenir”. Au bout de près de quatre heures, la “sentence” était différemment appréciée. Si certains restent toujours dans une situation d'“attente” d'initiatives des “pouvoirs publics” d'autres ont appelé à chercher ailleurs que les structures étatiques des réponses à ce véritable problème qu'est la migration clandestine. Tout compte fait, cette rencontre est venue encore une fois montrer la grande détresse dans laquelle se trouve notre jeunesse et aussi confirmer qu'il n'y a toujours pas eu de solutions. Entre-temps, sur nos eaux territoriales, beaucoup de nos jeunes se noient sur des embarcations de fortune sans avoir de réponses à leurs “questions”… Salim Koudil