Dans le cadre de l'événement “Mahmoud Darwich, une vie de poésie”, la salle Ibn Zeydoun de Riadh El Feth a abrité, avant-hier soir, un concert grandiose de Moneïm Adwan Quatuor. Ce groupe palestinien qui s'illustre dans le style populaire en proposant une musique arabe traditionnelle qui se mêle divinement bien à la sublime voix de Moneïm Adwan, leader et luthiste du groupe. Pour la soirée de vendredi, la formation a revisité son répertoire, mais a également proposé — pour coller au contexte — de revisiter les poèmes de Mahmoud Darwich. La première chanson avec laquelle le quatuor a ouvert le bal s'intitule Chat el bahr (le bord de mer). Triste et mélancolique, cette composition de Moneïm célèbre les petits plaisirs de la vie et de la nature. Elle chante la gloire d'autrefois et aborde avec tristesse et douleur le présent hypothétique des Palestiniens. Ensuite, Moneïm Adwan et ses acolytes, notamment le violoniste palestinien Safwan Kenani, le percussionniste syrien Samir Homsi et l'Egyptien Sayyed Chaâbane, ont repris un des poèmes de Darwich intitulé Aâref annani amchi ila ma lastou aâref (je sais que je marche vers l'inconnu). Suivront alors d'autres titres, notamment Ana eddarwich ouhibouki yaouman wa arhal ou encore Marha et Ilahi aedni ila watani. Ces très beaux textes ont été encore mis plus en valeur grâce aux compositions musicales de Moneïm Adwan, qui a une voix exceptionnelle et très puissante. D'autre part, ce quatuor très doué chante la douleur de tout un peuple meurtri et dont la terre a été spoliée, et c'est pour cela que la plupart des textes célèbrent l'errance et évoquent l'horizon et la mer. Il y a une sorte de naïveté largement perceptible dans le choix des mots et l'attachement à la nature, mais le propos est percutant. Le public a fusionné avec l'orchestre et la fin du concert a été couronnée par des applaudissements nourris des spectateurs. Dès sa sortie de scène, Moneïm Adwan s'est prêté au jeu des questions et réponses de la presse et a déclaré : “C'est notre première visite en Algérie. Mais l'Algérie n'est pas qu'une escale, car ce pays a une dimension et une place stratégique dans la lutte du peuple palestinien. Notre énergie, nous l'avons surtout puisée de l'Algérie.” Il a également ajouté : “J'ai chanté avec le cœur et le message est passé. Pour ma part, j'essaie de faire parvenir la voix du peuple palestinien dans le monde entier, en animant des concerts dans les pays arabes mais surtout en Europe.” En somme, ce concert d'une grande beauté et harmonie a été comme une mémoire non pas pour l'oubli mais contre l'oubli… Pour ne pas oublier la lutte d'un peuple, mais aussi pour ne pas oublier un poète contemporain, emblématique et universel, car grâce à Moneïm Adwan Quatuor, Darwich a ressuscité le temps d'une soirée.