L'argentier du pays, très à l'aise, lundi, lors de sa conférence de presse, a fait la démonstration que le pouvoir d'achat de la majorité des citoyens s'est amélioré ces dernières années. La pauvreté a reculé en Algérie. Si l'on s'en tient aux chiffres avancés, on ne peut que souscrire à l'arithmétique du ministre des Finances. Le salaire minimum a augmenté de 55% en termes réels (déduction faite de l'inflation, c'est-à-dire en termes simples de la hausse des prix) entre 1995 et 2004. Il y a un dynamisme salarial incontestable, a souligné M. Benachenhou : les rémunérations salariales entre 1995 et 2002 sont passées de 570 millions de dinars à 1 030 milliards de dinars. S'appuyant sur ces chiffres, l'argentier du pays conclut que le pouvoir d'achat des salariés a progressé. Si l'on fait parler la rue, elle vous dira que le ministre des Finances vit sur une autre planète. Les spécialistes de la communication, eux, nous rappellent qu'on peut faire dire aux chiffres ce que l'on veut. À l'épreuve des réalités, les statistiques du ministère des Finances ne montrent pas que l'essentiel des salaires versés en Algérie varient entre 10 000 et 20 000 DA net par mois, soit environ 100 à 200 euros. Pour une famille de sept personnes qui a un revenu situé dans cette fourchette, catégorie représentative de la majorité de la population, c'est une vie de misère. C'est ne pas pouvoir acquérir une partie de l'alimentation nécessaire à ses besoins quotidiens : les protéines (telles que la viande et le poisson), les fruits et ce qui constitue le minima d'une vie décente, un appartement assez spacieux pour sept personnes. Ne parlons pas de la voiture, de la satisfaction des besoins culturels et des loisirs élémentaires qui sont souvent sacrifiés, faute de revenus acceptables. Mais ne nous leurrons pas : le budget de l'Etat, dans la situation actuelle, et la santé des entreprises ne permettent pas une augmentation très importante des salaires. Mais cette misère incombe à nos gouvernants : le laxisme qui a perduré devant l'évasion fiscale, la fuite de capitaux, le long silence devant les enrichissements illicites, les diverses rapines, les salaires faramineux et les privilèges accordés à des salariés en haut de l'échelle non pas pour des raisons de mérite, mais pour appartenance à un clan du pouvoir. N. R.