L'hémicycle était quasiment vide, hier, bien qu'il y ait eu pas moins de 12 ministres programmés pour la séance des réponses aux députés sur le projet de loi de finances 2004. C'est le ministre de l'éducation nationale, Boubekeur Benbouzid qui a ouvert le bal en apportant une panoplie de chiffres en guise de réponses. Le ministre soulignera que “le budget de l'éducation nationale est évalué à 228 milliards de DA en 2004 dont 106 milliards de DA pour le fonctionnement et 41 milliards de DA pour l'équipement”. Les revalorisations des salaires et du Salaire national minimum garanti (Snmg) coûteront, selon Benbouzid, la bagatelle de 10 milliards de DA, tout en soutenant dans la foulée que “l'enveloppe consacrée aux paiements des salaires des travailleurs de l'éducation nationale est estimée à 162 milliards de DA, soit 87% du budget de fonctionnement du ministère”. De même, il notera que “le budget de ce secteur a triplé ces trois dernières années et le nombre de postes budgétaires ouverts durant cette période est évalué à 22 000 dont 7 000 prévus en 2004”. Il indiquera, également, que “nous avons consacré plus de 20 milliards de DA pour la réhabilitation et reconstruction des établissements scolaires et réceptionné 100 CEM et 65 lycées en 2003”. Concernant le livre scolaire, il dira : “Nous avons distribué 34,5 millions de livres dont 25,5 millions pour les anciens programmes et 10 millions pour les nouveaux programmes scolaires.” Il a qualifié la grève initiée par le Conseil des lycées d'Alger “d'illégale, car elle n'est pas conforme à la loi” et martèlera au passage : “Nous avons engagé des négociations avec le Satef, le Snapap, la FNTE et même avec des enseignants affiliés aux deux syndicats grévistes.” Tout de go, il annoncera la mise en place de trois groupes de travail qui examineront le statut de l'enseignant, la mise à niveau de l'enseignement secondaire et les salaires. Les conclusions de ces groupes de travail seront transmises, notera-t-il, au Chef du gouvernement. Il exprimera sa disponibilité au dialogue avec “tous les enseignants quelle que soit leur affiliation syndicale” et appellera à épargner l'école des luttes politiciennes. Le ministre de l'Emploi et de la Solidarité nationale, Djamel Ould Abbès, mettra l'accent sur l'effort considérable consenti par l'Etat en termes de transferts sociaux, qui représentent 10,5% du PIB en 2003. Ensuite, il exposera une série d'indications statistiques pour appuyer son argumentaire. Il relèvera que “près de 924 bus de transport scolaire ont été distribués de 1999 à ce jour, tandis que les handicapés ont bénéficié de 120 bus de transport scolaire". L'Etat consacre, selon Ould Abbès, 600 milliards de centimes chaque année pour le paiement de la prime de scolarité et autres charges sociales des enfants issus de familles défavorisées. Le département d'Ould Abbès a d'ores et déjà présenté 17 projets de décrets exécutifs à la chefferie du gouvernement dont 4 projets ont été examinés par le Conseil de gouvernement. En évoquant l'emploi des jeunes, il révélera que “le taux de non-remboursement des microcrédits a atteint 80% dans le secteur de l'agriculture”. Il précisera, par ailleurs, que “150 000 locaux seront mis à la disposition des collectivités locales qui seront chargées de les attribuer aux jeunes promoteurs de projets Ansej”. Le ministre affirmera que “nous prévoyons la création de 35 000 emplois en 2003 dans le cadre des contrats de pré-emploi dont 20 000 emplois pour les universitaires et 15 000 pour les autres catégories”. Le nombre de communes vivant au-dessus du seuil de la pauvreté est estimé à 173 sur l'ensemble du territoire national. Pour le ramadan, le ministre annoncera l'ouverture de 642 restaurants et une enveloppe de 163 milliards de centimes consacrés à la prise en charge des dépenses y afférentes. Le ministre de l'Agriculture, Saïd Barkat, a insisté sur les vertus du Plan national de développement agricole (PNDA) qui a permis d'avoir un taux de croissance, respectivement, de 24 et 18% en terme de production et valeur en 2003. Le montant de l'investissement agricole est évalué à 210 milliards de DA. Le coût consacré annuellement pour la subvention des prix du pain et lait est estimé, selon Barkat, entre 8 à 10 milliards de DA. Quant à l'adhésion de l'Algérie à l'OMC, il soutiendra que “le niveau de subvention accordé à la production agricole ne dépasse pas 4,5% contre 45% en France et 42% dans les pays de l'OCDE”, tout en précisant : “Nous subventionnons uniquement les moyens de production”. Continuant sur sa lancée, il dira : “Nous avons subventionné près de 225 000 coopératives agricoles à raison de 70 millions de centimes pour chacune d'entre elles.” Pour Saïd Barkat, le dossier de la dette des agriculteurs a été ficelé en 2002 et l'Etat ne peut pas continuer à effacer les dettes des agriculteurs tout le temps. Ces derniers doivent se conformer, ajoutera-t-il, aux règles de l'économie et rembourser leurs crédits bancaires. Près de 950 000 dossiers d'agriculteurs ont été traités par le ministère de l'Agriculture dans le cadre de l'effacement de la dette des agriculteurs, rappellera-t-il. Transport Le ministre des Transports affirme que le renouvellement de la flotte d'Air Algérie est en cours d'exécution. Il a parlé d'achat de six ATR 71 en plus des deux ATR de l'ex-Khalifa Airways, pour desservir les aéroports de l'intérieur. Air Algérie, justement, pour une meilleure utilisation de la flotte intérieure, envisage de “réorganiser le marché intérieur”. Le ministre a, par ailleurs, évoqué l'acquisition de cinq gros porteurs et 3 appareils moyens porteurs 737-800 nouvelle génération. Sellal qualifie d'hécatombe, le nombre d'accidents de la route. S'appuyant sur une enquête, il souligne que deux tiers des automobilistes ne portent pas de ceinture de sécurité. 38% de ces accidents sont dus à l'excès de vitesse, 30% au refus de priorité. Le ministre des Transports affirme que 90% des amendes ne sont jamais payées. Il propose alors de durcir les sanctions. Il parle d'élargissement de retrait de permis de conduire à 26 cas au lieu de 7 actuellement. Il exhorte, en outre, les députés à voter la mesure d'interdiction d'importation de véhicules de moins de trois ans. Sellal relève que 115 000 véhicules ont été contrôlés dans le cadre du contrôle technique de véhicule. 154 ont été arrêtés. Concernant le chemin de fer, le ministre des Transports reconnaît le retard accusé dans ce cadre. Dans la foulée, il annonce le projet de déboulement et d'électrification de la ligne ferroviaire relayant les frontières Est-Ouest pour les besoins de train à grande vitesse. Le ministre précise, en ironisant, que “ce n'est pas le TGV”. Travaux publics Selon le ministre des Travaux publics, l'Algérie compte 107 000 kilomètres de route. 28% sont des routes communales, 69% sont des routes nationales et 33 routes wilayales sont en bonne santé. Omar Ghoul souligne que la plupart des routes communales sont en mauvais état. Par ailleurs, les besoins de réhabilitation des routes de wilaya et nationale jusqu'à 2006 sont évalués à 300 milliards de dinars. Concernant l'autoroute Est-Ouest, le ministre des Travaux publics affirme que, pendant 20 ans, 15 kilomètres seulement ont été réalisés. “Aujourd'hui, on en est à 120 kilomètres, et 300 kilomètres sont encore en chantier”, affirme-t-il. Télécommunications Amar Tou, l'ancien président de l'Autorité de régulation et actuel ministre des Postes et Télécom-munications et Nouvelles technologies d'information, souligne que le nombre de téléphones fixes en Algérie s'élève à 2,1 millions. Alors qu'au Maroc, il n'est que de 1,1 million. Mais pour le portable, le Maroc compte 7 millions de lignes. L'Algérie dépasse à peine les 1,3 million de lignes. Le ministre annonce que la facturation sera totalement informatisée à Alger d'ici à la fin de l'année. Elle sera généralisée sur tout le territoire national en 2004. F. M. / M. R. FLN : “Le taux de croissance est artificiel” Le FLN estime que la croissance économique de 6,5% enregistrée cette année “n'est pas le résultat d'une bonne gestion mais qu'elle est due à la stabilité des prix du pétrole et à l'injection de fonds publics dans des secteurs non productifs”. Ce parti soutien que ce taux de croissance “est superficiel et artificiel”. Le groupe parlementaire du FLN estime que les objectifs annoncés du plan de soutien à la relance économique “n'ont pas été atteints en raison de la mauvaise utilisation de l'argent public”. Les parlementaires du FLN regrettent la manière avec laquelle le gouvernement a géré la grève des enseignants et propose “d'ouvrir le dialogue”. Plus politique, le FLN estime que “le piétinement du système de la majorité et le musellement des libertés publiques sont une aventure politique qui mène vers l'impasse”. En revanche, Miloud Chorfi, président du groupe parlementaire RND, estime que “le taux de croissance économique réalisé et escompté constitue un signe fort du retour de la croissance”. Il se dit satisfait des mesures prévues dans le projet en matière de soutien aux investissements, en saluant au passage les efforts consentis pour la réduction de la dette. Le président du groupe parlementaire RND estime nécessaire la résorption du déficit trésorier et la révision de son mode financement pour éviter les répercussions inflationnistes. Miloud Chorfi souligne que “10 000 familles sinistrées ont été relogées en un temps record”. Abdelghafour Saâdi, du groupe parlementaire du Mouvement de la réforme nationale, quant à lui s'est interrogé sur les raisons de l'adoption “d'un prix référentiel de 19 dollars le baril au moment où les experts prévoient des prix de 25 à 26 dollars l'année prochaine”. Le représentant du MRN souhaite que le gouvernement “présente un exposé sur l'utilisation des affectations financières de l'année en cours” pour permettre aux députés d'évaluer les mesures adoptées l'année dernière ainsi qu'un exposé détaillé sur la dette extérieure. Le représentant des indépendants demande au gouvernement de présenter un rapport sur la gestion des fonds spéciaux, dont le nombre dépasse, selon lui, 60. Jelloul Djoudi, président du groupe parlementaire du Parti des travailleurs (pt), trouve le relèvement du SNMG à 10 000 dinars insuffisant, argumentant qu'une “famille de 7 personnes a besoin de pas moins de 24 000 dinars mensuellement pour ne pas vivre dans la pauvreté”. M. R.