Liberté : Le ministre de l'Intérieur a annoncé, en marge de la visite du Président dans la capitale, l'évaluation du corps électoral à 17,5 millions. Ce chiffre reflète-t-il la réalité selon vous? Messaoud Chihoub : Je n'ai pas de données à ce sujet. Mais la révision du fichier électoral constitue l'une des recommandations majeures de la commission juridique à l'APN. Je vous préciserais, à ce propos, que notre structure a avalisé la remise d'une copie de la liste électorale à chaque parti et à chaque candidat à la prochaine présidentielle. Existe-t-il un recours, en cas de contestation des candidats et des partis sur la taille réelle du corps électoral ? Les candidats et les partis ont le droit d'introduire, dans ce cas de figure, des recours auprès des juridictions administratives compétentes. Votre commission a fait des propositions pour amender l'actuelle loi électorale. Quels sont les principaux points à retenir dans ces propositions ? Dans la commission juridique, on a travaillé sur deux volets : Le premier concerne les recommandations dont, essentiellement, la réduction maximum du nombre des bureaux itinérants et l'assainissement des listes électorales. Il faut savoir que ces recommandations sont soumises au pouvoir discrétionnaire de l'administration. C'est-à-dire que cette dernière peut les accepter comme elle peut les rejeter. Ce qui ne sera pas le cas des amendements, qui constituent le second volet de nos travaux, qu'on apportera à la loi électorale et qui auront un pouvoir exécutoire. Parlant des amendements, il s'agit, premièrement, de l'approfondissement du contrôle judiciaire sur l'ensemble des étapes de l'opération électorale (préparation des listes, candidatures, dépouillement…) pour qu'en cas de faille, les candidats aux présidentielles puissent introduire des recours auprès des juridictions administratives compétentes. Deuxièmement, la commission a instauré un système de recours contre les décisions du Conseil constitutionnel, en cas du refus de candidatures à la magistrature suprême. Troisièmement, notre structure vient d'instaurer un recours en cassation devant le Conseil d'Etat contre toute décision judiciaire de la chambre administrative concernant les opérations électorales. C'est dans le but de donner plus de garanties et plus de moyens de recours aux candidats à la magistrature suprême que nous avons songé à ce genre de dispositions. Quatrièmement, on a instauré la neutralité de l'administration par une séparation des pouvoirs. En ce sens que l'administration encadre et prépare les élections, et que la justice aura à contrôler toutes les actions de l'administration par des procédés judiciaires bien arrêtés. Cinquièmement, on a institué le contrôle des procès-verbaux (PV) de dépouillement par les partis politiques lors des opérations électorales. Cette dernière disposition n'est pas une nouveauté… Elle est une nouveauté dans la mesure où elle devient une disposition légale de la loi électorale, alors qu'auparavant elle était contenue dans un décret. Sixièmement, la commission a procédé à la suppression des bureaux spéciaux. Mais, selon le ministre de l'Intérieur qui s'exprimait mercredi dernier à la radio chaîne I, il n'y aura pas suppression des bureaux spéciaux... Oui, j'ai entendu ces propos du ministre à la radio. Mais moi, je m'en tiens à ce qu'il nous a affirmé au sein de la commission juridique. Il nous a déclaré en substance qu'il n'était ni pour ni contre la suppression des bureaux spéciaux, et que la commission juridique est libre et souveraine dans ses prises de décision. La commission a donc abrogé les bureaux spéciaux. Les corps constitués voteront par conséquent comme le reste des citoyens dans leurs lieux de résidence. Des voix s'élèvent selon lesquelles la révision de la loi électorale actuelle ne pourra pas entrer en vigueur avant la convocation du corps électoral prévue entre le 27 janvier et le 27 février 2004. Êtes-vous de cet avis ? Absolument pas ! Bien au contraire, je pense qu'on a suffisamment de temps pour que la loi électorale amendée entre en vigueur. L'APN adoptera le texte de loi le 4 janvier prochain. Les débats autour de cette loi ne prendront que 3 à 4 jours au Conseil de la nation puisque cette institution ne peut pas procéder à son amendement. Ensuite, le texte passera au Conseil constitutionnel. Selon vos estimations, quand la loi électorale entrera-t-elle en vigueur ? Entre le 15 et le 20 janvier prochain Et si le Conseil constitutionnel la bloque ? En tant qu'homme de droit convaincu du principe de la séparation des pouvoirs, je vous dirais que nous, en tant que législateurs, on fera notre travail, et au Conseil constitutionnel en tant qu'organe de contrôle de faire le sien, que de toutes les façons nous respecterons. N. M.