L'ancien chef de la Zone autonome d'Alger (ZAA), Yacef Saâdi, va intenter un procès contre le journaliste franco-américain Ted Morgan, de son vrai nom Sanche Charles Armand Gabriel de Gramont, auteur du livre Ma bataille d'Alger, pour "défendre (son) honneur et l'honneur de (ses) compagnons". L'annonce a été faite hier, lors de la conférence de presse qu'il a animée au domicile familial, à Hydra (Alger), aux côtés des membres de sa famille et de ses amis, dont Youcef Zani, son ex-collaborateur du temps de la ZAA. Dans "une mise au point" lue aux médias, le moudjahid a révélé qu'aujourd'hui, il sort de son "silence", car il craint que sa "position de réserve" ait été interprétée "autrement que par une décision de sagesse et de sérénité". Il a ainsi dénoncé les "déballages incongrus" de l'ancien "sous-lieutenant (...) (du) régiment sénégalais de l'infanterie coloniale", lui reprochant d'occulter la vérité "pour des buts inavoués". Yacef Saâdi a tenu à rappeler que Ted Morgan était "soldat de propagande", pendant la Révolution, restant également un "témoin des violences et des atrocités" perpétrées durant la "Bataille d'Alger" : un témoin "non seulement passif mais aussi complice". Il a mis au défi le journaliste de lui montrer "au moins" une preuve "dûment authentifiée" de ce qu'il avance dans son ouvrage, en lui promettant un procès qui "mettra fin à (son) audace, voire à (son) effronterie". Le conférencier a, en outre, déploré les "accusations gratuites" et "révélations diffamatoires" émanant d'un "étranger", auteur d'un brûlot, les qualifiant de campagne "de mauvaise facture". Non sans inviter ceux parmi les tenants du colonialisme qui sont encore vivants de "s'exprimer courageusement et sincèrement sur ce sujet". Yacef Saâdi, dans ce cadre, a fait savoir que son témoignage est conforté par des "documents authentiques" en sa possession, pouvant "confondre et accuser plus d'un". Ces archives, a-t-il souligné, lui permettent d'engager une "opération de rectification", sinon "une fidèle reconstitution de toute la période où nous avons combattu obstinément contre cette ‘Bataille d'Alger' (...) imposée par les forces coloniales". "Cette reconstitution viendra à point nommé, pour restituer tous les événements dans leur véritable contexte", a-t-il averti, signalant que ses propos s'adressent "en premier" à Ted Morgan, de même qu'à "tous ces ‘autres' qui s'évertuent dans la palabre, sans pouvoir apporter un iota de vérité". L'ex-premier responsable politico-militaire de la ZAA a donc avisé de son intention d'ester en justice le journaliste franco-américain. "Mais, dans le cas où vous n'accepteriez pas ce défi ou cette confrontation, c'est selon, faites amende honorable et demandez pardon, non pas à moi seulement, mais à tous les patriotes de mon pays, par les moyens que vous jugerez utiles", a encore indiqué Yacef Saâdi, tout en signifiant que cette "campagne fallacieuse et savamment préparée dans des officines spécialisées de la guerre psychologique, pour occulter les véritables responsables du drame algérien" doit cesser maintenant. L'autre personne à s'être exprimée hier est le fils de Yacef Saâdi. "Nous allons prendre 3 ou 4 avocats pour défendre mon père", a annoncé Amine Yacef, après avoir décortiqué des passages du livre de Ted Morgan et exposé les "contradictions", en se référant notamment aux mémoires de Yacef Saâdi, mais aussi aux écrits et déclarations publiques de responsables français de l'époque, dont les capitaines Léger et Chabannes, ainsi qu'à une série de correspondances entre les militants de la ZAA, même celles rangées dans le chapitre de "double jeu" par l'ancien colonisateur avec l'observation de "manipulation d'agents". Des documents rendus publics désormais et pouvant être exploités par nos historiens, qui confirmeraient le "démantèlement" de toute la Zone autonome, et incrimineraient tous "l'agent double" Guendriche Hacène, alias Judas-Zerrouk-Safi. Hafida Ameyar