Le motif de la sortie du Maroc de l'OUA, devenue entre-temps UA, à savoir l'adhésion de la République arabe sahraouie démocratique à cette instance continentale, est toujours là, d'où l'interrogation sur cette demande de réintégration du royaume. Le roi Mohammed VI a annoncé dimanche que le moment était "arrivé" pour que le Maroc retrouve sa "place naturelle" au sein de l'Union africaine, qu'il avait quittée en 1984 pour protester contre l'admission, deux années plus tôt, de la République arabe sahraouie démocratique. Cette demande de réintégration, qui est loin de constituer une surprise en raison de la campagne diplomatique de préparation mise en branle par Rabat pour l'accompagner d'un maximum de soutien pour sa réussite, constitue en fait un aveu d'échec de la politique suivie durant les quatre dernières décennies par le Makhzen. Il faut croire que le Maroc, qui n'a gardé des relations avec certains pays du continent que pour des raisons purement économiques, est allé jusqu'à intégrer le Conseil de coopération du Golfe, l'organisation des royaumes et émirats arabes située en Asie, pour montrer qu'il n'avait plus rien à voir avec l'Afrique. Ceci étant, le lobbying exercé par la diplomatie marocaine a certes retardé le règlement du conflit du Sahara occidental, mais n'a pas permis au Maroc d'atteindre son objectif consistant à annexer ce territoire, qui était sous occupation espagnole jusqu'en novembre 1975. À ce jour, le royaume chérifien n'a obtenu aucune reconnaissance officielle quant à sa souveraineté sur le Sahara occidental. En dépit de toutes ses manœuvres à l'ONU, dont la dernière en date était l'exclusion du personnel de la Minurso qu'il est en train, contre son gré, de réintégrer à leurs postes en vertu de la résolution 2285 du Conseil de sécurité du 29 avril 2016, le Maroc n'est pas parvenu à légaliser son coup de force d'occuper l'ancienne colonie espagnole. Constatant que cette politique de fuite en avant n'a été d'aucune utilité, voire même qu'il avait énormément perdu en Afrique, car ne pouvant plus s'exprimer au sein de l'instance continentale, le souverain marocain semble changer son fusil d'épaule. Il faut croire que Rabat n'a rien fait durant cette période pour améliorer ses relations avec les instances africaines, y compris sportives à l'image de la Confédération africaine de football avec laquelle elle était entrée en conflit en refusant d'organiser à la dernière minute la phase finale de la Coupe d'Afrique des nations de football 2015 sous prétexte de la menace du virus Ebola. Aujourd'hui, Mohammed VI semble vouloir procéder autrement, mais reste à savoir comment se fera cette réintégration conditionnée, à une organisation qualifiée par le roi Hassan II de "conférence tam-tam", lorsqu'il a décidé de la quitter en 1984. En effet, le Maroc ne demande ni plus ni moins que l'exclusion de la République arabe sahraouie démocratique, qui jouit de la qualité de membre à part entière de l'Union Africaine depuis maintenant trente-quatre années. À voir le déroulement des travaux du sommet de cette organisation, qui s'est ouvert dimanche par l'hommage observé par les dirigeants africains, à travers une minute de silence, à la mémoire du défunt président sahraoui Mohamed Abdelaziz, et l'accueil réservé au nouveau président sahraoui, Ibrahim Ghali, auquel a été exprimé le soutien au droit à l'autodétermination du peuple du Sahara occidental, il est peu probable que le souhait de voir la RASD exclue de l'UA soit exaucé. Merzak Tigrine