Selon les délégués du Camra, pas moins de 600 médecins généralistes ont été recrutés par le ministère à travers le dispositif Anem pour remplacer au pied levé des médecins spécialistes en formation. Les membres du bureau national du Camra ont animé, hier, à Alger, une conférence de presse durant laquelle ils ont tenu à alerter l'opinion et les pouvoirs publics sur "l'état dramatique" dans lequel se débattent les CHU et les autres établissements hospitaliers. Les médecins résidents, qui se sentent interpellés par la "situation pathologique" qui prévaut dans les hôpitaux, font montre d'une bonne volonté devant contribuer à débloquer le conflit qui couve depuis six mois dans les structures de santé. "La tutelle est totalement responsable du blocage des hôpitaux et du pourrissement de la situation. Le ministère a investi toute son énergie uniquement pour noyer nos revendications et tourner en rond pendant plusieurs semaines au lieu de résoudre, à travers un dialogue sérieux et responsable, les problèmes que nous lui soumettons depuis novembre 2017. Le ministère a préféré les atermoiements", ont-ils dénoncé, avant de se poser la question : "À qui profite le blocage des hôpitaux ?" La sortie médiatique des représentants du Camra se veut aussi un rappel des objectifs assignés à leur mouvement de grève qui "se porte toujours bien". "Les résidents ont sacrifié plus de six mois de leur cursus et de leur activité hospitalière pour changer l'ordre des choses dans les structures sanitaires et, du coup, améliorer les conditions de prise en charge des citoyens qui sont toujours lésés", affirment encore les résidents, soulignant l'urgence de l'intervention du premier magistrat du pays pour débloquer la situation qui pénalise en premier lieu le citoyen. "Les 15 000 résidents en grève illimitée interpellent le président de la République pour dénouer ce conflit. Nous sommes prêts à montrer des signes de bonne volonté, et ce, pour mettre fin à ce pourrissement, à condition que la tutelle revienne à la sagesse", promettent-ils. L'opportunité a été mise à profit par les animateurs du Camra pour rappeler le contexte et dénoncer la politique suivie par le département de Hasbellaoui qui a poussé les résidents à opter pour la radicalité de leur mouvement de protestation. La suspension des gardes dans les hôpitaux est intervenue, disent-ils, comme un ultime moyen de pression sur la tutelle, d'autant que le système des gardes dans les hôpitaux repose sur les 15 000 résidents en grève. "Les moyens de pression sur la tutelle vont crescendo. Nous n'avons pas arrêté les gardes par gaieté de cœur, mais nous y avons été obligés." Lors de la conférence de presse, il a été révélé que pas moins de 600 médecins généralistes ont été recrutés par le ministère à travers le dispositif Anem pour remplacer au pied levé des médecins spécialistes en formation. "La loi interdit aux généralistes de pratiquer des actes qui relèvent du domaine des spécialistes. On n'est toujours pas sorti du bricolage", déplorera le Dr Sofiane Bensebaâ du CHU de Tizi Ouzou. Sur un autre plan, les membres du Camra rappelleront que rien ne va dans les hôpitaux. "Notre mouvement a le mérite de mettre à nu une gestion chaotique de nos hôpitaux. Nous avons dénoncé la rupture des médicaments de base, des réactifs, les agressions des résidents pendant les gardes de nuit, l'absence de paramédicaux, etc." Les résidents soulignent que ce qui se passe pendant les gardes est inacceptable. "Il se passe des choses qui dépassent tout entendement pendant les gardes de nuit, des objets de malades volés et autres. Rien ne va plus", dénoncera encore le Dr Taïleb. Par ailleurs, les résidents ont saisi l'opportunité de cette sortie médiatique pour dénoncer le manque d'intérêt qu'accordent les pouvoirs publics au dossier de la formation de médecin en Algérie. "Nous tirons la sonnette d'alarme : la formation dispensée aujourd'hui est médiocre. À titre d'exemple, pour devenir un spécialiste en chirurgie après cinq années d'activité théorique et pratique, il suffit de répondre à une seule question : comment opérer un sujet souffrant de vésicule biliaire ? Nous avons interpellé les responsables sur la question. En vain. L'essentiel pour les pouvoirs publics est de placer des personnes pour assurer la garde dans les hôpitaux. Le reste importe peu", ajoutera le Dr Bensebaâ. Le Collectif des médecins résidents algériens invite, enfin, ses aînés, les professeurs et autres maîtres assistants à soutenir son mouvement qui vise, en finalité, à changer et améliorer le système national de santé. Hanafi H.