Au lieu d'établir un dialogue direct avec Téhéran, Riyad cherche à entraîner une nouvelle fois les pays de la sphère arabe dans sa lutte d'influence dans la région avec l'Iran, au nom d'une présumée rivalité entre chiites et sunnites. Suite aux accusations de "sabotage de navires dans le Golfe" et d'"attaques contre des stations de pompage dans le royaume", l'Arabie Saoudite a appelé samedi soir à la convocation de sommets du Conseil de coopération du Golfe (CCG) et de la Ligue arabe, officiellement "pour discuter de ces agressions et de leurs conséquences sur la région". Ces deux sommets extraordinaires, auxquels Riyad invite les pays membres de ces deux organisations régionales, sont annoncés pour le 30 mai à La Mecque, selon l'agence de presse officielle saoudienne SPA. Selon cette même source, le but de ces sommets est "de se consulter et de se coordonner avec les dirigeants frères" à propos de "tous les sujets susceptibles de renforcer la sécurité et la stabilité dans la région". Le communiqué du gouvernement saoudien souligne "les graves conséquences de ces attaques", notamment pour "les routes d'approvisionnement et la stabilité des marchés mondiaux du pétrole". Les Emirats arabes unis ont aussitôt "salué" cette initiative. La connivence saoudo-émiratie est perceptible dans les déclarations du ministre des Affaires étrangères de l'Arabie Saoudite, lequel, interrogé sur les récentes attaques contre des navires dans le Golfe, a répondu : "Nous enquêtons sur ce problème. Les principaux enquêteurs sont bien sûr les Emirats arabes unis (...) Nous avons quelques indications et nous allons les présenter lorsque l'enquête sera achevée." Cette manière de faire de Riyad soulève moult interrogations. Elle accuse l'Iran d'être derrière ces agissements, mais n'ose pas l'attaquer seule de front. Ne se satisfaisant pas du soutien des Emirats arabes unis, l'Arabie Saoudite semble vouloir entraîner tous les pays arabes dans son sillage. Pour y parvenir, Riyad a opté pour cette stratégie de convoquer un sommet du Conseil de coopération du Golfe, qui sera suivi d'un autre de la Ligue arabe. Il va sans dire que les pays membres du CCG, à l'exception du Qatar, vont apporter un soutien sans failles et sur tous les plans à l'Arabie Saoudite. Les résultats de ce sommet seront certainement mis sur la table devant les membres de la Ligue arabe dans l'espoir de leur forcer la main afin qu'ils s'alignent eux aussi derrière Riyad. Pendant ce temps, le royaume wahhabite s'attelle à marteler, par la voix de son chef de la diplomatie Adel al-Jubeir, qu'il "ne veut pas une guerre" avec l'Iran et "va tout faire pour la prévenir". Il n'en demeure pas moins qu'il assure que Riyad est prêt "à se défendre et à défendre ses intérêts" si l'autre partie choisit d'aller vers la guerre. Cela cache mal une volonté de vouloir en découdre avec ce rival iranien, qui fait de l'ombre à l'Arabie Saoudite dans la région.