Mettant à profit la situation ambiguë prévalant en Egypte depuis les attaques terroristes, le raïs confirmera officiellement son intention de briguer un cinquième mandat. Alors que des analystes estiment que la vie politique égyptienne ressentira, pendant longtemps encore, les retombées des récentes attaques terroristes, y compris sur la scène internationale, Hosni Moubarak n'hésite pas à annoncer sa candidature. Conforté dans sa position par cette insécurité qui effraye les Egyptiens, le raïs compte bien en tirer profit. Il suffit de se référer à l'analyse de la situation politique égyptienne pour comprendre que tout est favorable à Moubarak. La levée de l'état d'urgence, en vigueur en Egypte depuis l'assassinat du président Anouar As Sadate, en 1981, n'est pas pour bientôt, affirment certains observateurs. Les attentats de Charm el Cheikh constituent un argument massue entre les mains du pouvoir du Caire pour maintenir les choses telles qu'elles sont. En Effet, Hosni Moubarak peut même envisager de renforcer l'état d'urgence en arguant que c'est le seul moyen d'éviter au pays d'autres catastrophes de ce genre, et nul ne pourra s'y opposer. Il faut dire que ces événements dramatiques tombent au moment opportun pour le raïs, qui ne pouvait pas mieux espérer pour faire monter sa cote auprès des Egyptiens, dont une bonne partie le soutient toujours, faute d'une opposition convaincante. Hormis les islamistes égyptiens qui constituent l'essentiel de l'opposition à travers l'organisation des Frères musulmans, le reste n'a jamais inquiété le sérail. Et ces attentats viennent saper les efforts des Frères musulmans pour mettre Moubarak en difficulté. Tolérés seulement, mais non autorisés à activer publiquement sur la scène politique nationale, les Frères musulmans risquent de voir leur rayon d'action réduit à néant à l'avenir. Quant au reste de l'opposition, dont l'activité ne dérange nullement le pouvoir en place, il ne risque pas de perturber l'avenir politique du raïs. Ebranlés par ce terrible coup du sort, les Egyptiens n'envisageront certainement pas le changement à la tête du pays, qui a besoin, plus que jamais, d'un homme politique chevronné pour remonter la pente. Des analystes pensent que le fait que les attentats de Charm el Cheikh “visent à discréditer le régime en défiant sa capacité à assumer sa propre sécurité, au moment même où il se présente comme garant de la sécurité régionale”, constitue un avantage certain pour le régime Moubarak. Les Egyptiens, habitués à l'aura de leur pays sur la scène internationale et régionale surtout, n'accepteront pas de prendre le risque de l'enfoncer davantage en optant pour un novice en politique. La propagande du pouvoir s'attelle déjà à persuader l'opinion publique locale que Hosni Moubarak est le seul homme à même de préserver le rang de l'Egypte de la déchéance. Charm el Cheikh n'est plus ce havre de paix qui accueille dans la sécurité des sommets mondiaux d'envergure, dont l'Egypte tirait sa fierté. Pis, médiateur incontournable jusque-là entre Israël et l'Autorité palestinienne à l'approche de l'opération de retrait israélien de la bande de Gaza, le Caire voit sa position affaiblie. Partant de là, le président égyptien est bien parti pour pérenniser son règne au pays des Pharaons. Liens entre les attentats de Charm el Cheikh et Taba L'enquête sur les attentats de Charm el Cheikh a pris une nouvelle direction, la police ayant désormais établi des liens avec les attaques sanglantes de Taba, aussi dans le Sinaï, en octobre 2004. Le mode opératoire, les cibles, la nature des explosifs, le moment choisi des attentats et un suspect pointeraient vers cette piste, à envisager avec prudence, pouvant conduire à un même groupe d'islamistes non identifié. Elle succéderait à la “piste pakistanaise”, démentie, mardi dernier, par les officiels égyptiens, les six Pakistanais recherchés étant en fait, selon eux, des immigrants illégaux qui auraient gagné Israël via le désert du Sinaï. Selon une source sécuritaire, les experts du laboratoire criminel estiment que les explosifs utilisés, samedi dernier à Charm el Cheikh, comportaient une grande quantité du même genre d'explosifs utilisés à Taba. K. ABDELKAMEL