Mouzahem Yahia a travaillé comme assistant réalisateur. Il a réalisé quelques films d'essai. “Orange” est son premier court métrage. Dans ce film, présent à la dernière édition du Festival du court métrage à Clermont-Ferrand, raconte l'histoire de deux hommes qui se battent sans raison. La bagarre débute dans un marché coloré, débordant de fruits et légumes. Elle se poursuit dans des décors de plus en plus austères et dépouillés, alors que l'état physique des deux belligérants se dégrade a vue d'œil. Présent à Locarno, le jeune réalisateur parle de son expérience cinématographique et de ses projets. Liberté : Vous êtes à Locarno pour présenter un projet de film aux producteurs présents au festival. Quelles sont vos premières appréciations ? Mouzahem Yahia : J'ai déjà atteint mon but qui est de voyager, de rencontrer des gens, d'élargir mon champ de vision et, surtout, de remplir mon carnet d'adresse. J'ai présenté mon projet de film à plusieurs producteurs qui ont manifesté de l'intérêt. Je me sens déjà content. Concrètement, est-ce qu'il y a quelque chose de conclu ? Dans l'état actuel des choses, je ne peux pas affirmer cela. Par ailleurs, je peux dire que mes discussions ont abouti à la demande de montrer mon scénario, de donner plus de détails sur mon projet et de clarifier mes choix. En somme, je ferai ces choses- là une fois à Alger. Ensuite, il ne me restera qu'à attendre les réactions. Vous présentez un projet de film complexe. Les producteurs et les institutions n'attendent pas toujours cela de la part des cinéastes du Sud. N'avais-vous pas peur de venir avec un projet pareil ? C'est vrai que les chances d'avoir des financements pour un tel projet sont minimes. Mais, je ne voudrais pas non plus m'inscrire dans cette perspective de commander la création. Je monte mon film dans ma tête, avant de le mettre sur pellicule. Bien évidemment, il subit des modifications en fonction de mes interactions avec les gens. Maintenant, je n'irai pas jusqu'à me trahir pour satisfaire une quelconque personne ou institution. Il y a toujours des ouvertures. Ici, à Locarno, j'ai rencontré un producteur qui s'est montré très intéressé par les films complexes. C'est avec lui que je vais tenter ma chance. Vous faites des films qui ne s'inscrivent pas dans une tendance déjà connue en Afrique du Nord. Vous osez prendre des voies novatrices et expérimentales, au point d'avoir tenté de diriger sur un plateau des cafards… Vous pensez certainement à Guerleloumania. Souvent, je m'inspire de la société, des hommes, des femmes... La situation en Algérie m'avait inspirées beaucoup d'idées qu'on peut considérer comme étranges. Mais, pour moi, c'est un moyen de traduire mes idées. Je pense par exemple au cafard qui a une capacité d'adaptation incroyable. Il ne sort que la nuit, il est détesté et menacé de disparition. Sans trop m'attarder sur cela, j'y pense en voulant parler de l'évolution de la société algérienne. En Algérie, la formation est quasiment inexistante… Comment avez-vous été formé au métier ? Autodidacte. En lisant et en faisant des films. Je trouve dommage que les stages de formation sont quasiment inexistants en Algérie. J'espère que la situation changera. Cela rendra service au cinéma algérien. Vous avez affirmé récemment que vous avez eu un prix à Clermont-Ferrand et que vous êtes en tournage pour la télé. Ce sont deux informations fausses… Je crois qu'il y a eu un malentendu. J'ai dû m'exprimer mal. J'ai juste dit que mon film Orange était présent à Clermont-Ferrand et que je suis en négociation avec la télévision pour la réalisation d'un feuilleton pour le mois du ramadan. On nous a donné l'accord, mais rien n'est définitif. Rumeurs, etc. ça va intéresser Mohamed Latrèche…? Non. Lui, il est concentré sur la poursuite du prix Léopard de demain. T. H.