Selon certains députés signataires de la résolution, l'élection présidentielle du 12 décembre prochain annonce une plus grande glaciation du pouvoir. Le Parlement européen, qui a voté avant-hier une résolution d'urgence et non contraignante sur la situation en Algérie, a également répondu aux accusations d'ingérence portées contre lui par les autorités algériennes, en précisant que son intention n'est pas de se mêler des affaires de l'Algérie, mais d'attirer l'attention sur les violations des libertés collectives et individuelles qui se sont multipliées depuis le début du mouvement populaire, à savoir le hirak, le 22 février dernier. "Notre respect pour la souveraineté et l'autonomie de l'Algérie est total (...) C'est aux Algériens et à eux seulement de décider du présent et du futur de leur pays", a souligné la vice-présidente de la Commission européenne et haut-commissaire en charge de la politique étrangère et de la sécurité de l'UE. Federica Mogherini est intervenue à la fin d'une séance de trente minutes, qui a permis à une dizaine de députés signataires du projet de la résolution de s'exprimer sur son contenu, avant le vote final. Premier à prendre la parole, le député francais Raphaël Glucksmann a tenu également à préciser que le texte, dont il est en partie l'auteur, n'a pas été conçu dans un esprit paternaliste. "La résolution de solidarité que nous allons voter aujourd'hui n'est pas une ingérence. C'est la fin d'une immense injustice", a-t-il fait savoir, appelant ses collègues du Parlement à soutenir le combat du peuple algérien pour la démocratie. "Depuis que je suis député, nous avons voté des résolutions sur des sujets très divers, sur des pays aussi lointains que l'Indonésie, mais nous n'avons pas eu un mot sur la formidable révolution qui a lieu juste de l'autre côté de la Méditerranée, en Algérie. Pas un mot de soutien à ces millions d'Algériennes et d'Algériens qui défilent dans les rues d'Alger et dans les autres villes algériennes depuis neuf mois pour la démocratie, la justice, la dignité. Pas un mot sur les arrestations, les violences qui s'abattent sur eux. Pas un mot sur les cas de torture désormais avérés. Ce silence complice savamment entretenu par des lobbys puissants ne peut plus durer", a précisé le député. Les parlementaires qui lui ont succédé ont mis en évidence, mais très succinctement, les formes de la violence qui s'abat sur la population algérienne depuis des mois : intimidations, arrestations, censure, persécution des minorités religieuses… "Nous devons adopter cette résolution contre une intolérable et absurde répression qui risque de briser (le) rêve algérien", a appelé Bernard Guetta, élu au Parlement de Strasbourg sur la liste du parti de la République en marche du président Emmanuel Macron. Natalie Loiseau, ancienne ministre des Affaires européennes dans le gouvernement d'Edouard Philippe, a également signé le texte de la résolution au nom du groupe Renaissance, qu'elle représente au Parlement européen. Mais elle était absente à la plénière. À la place, la représentante du Parti socialiste belge, Maria Arena, a tenu à expliquer, de vive voix, pourquoi la situation en Algérie est si alarmante. "Des dizaines de personnalités sont actuellement en détention pour avoir simplement exprimé une option sous le prétexte qu'ils porteraient atteinte à l'unité nationale. Des medias ont été mis sous pression et ont dû cesser leurs activités, ainsi que des Ong", a expliqué l'oratrice, estimant qu'il est du devoir de l'Europe de rappeler "les priorités communes de partenariat avec l'Algérie (…) dans lesquelles les deux parties ont réaffirmé leur engagement à respecter les valeurs universelles de démocratie, de l'Etat de droit et des droits humains". S'inquiétant de la mise en place d'un régime autoritaire, le Britannique Phil Bennion a, pour sa part, affirmé qu'il "serait tragique que l'Algérie rate la chance de changer de voie". La même préoccupation a été exprimée par Salima Yenbou. Le groupe des Verts, dont elle est députée, a appuyé la résolution sur l'Algérie, en dépit de certaines réserves (sur le timing, le risque de décrédibilisation de l'opposition algérienne et l'appui à la rhétorique du régime sur l'ingérence étrangère).