Au lendemain de l'installation officielle d'Abdelmadjid Tebboune comme chef de l'Etat, la classe politique est divisée. Les opposants, dans leur grande majorité, estiment que l'installation du nouveau chef de l'Etat ne règle pas tous les problèmes du pays. D'autres estiment que c'est "un fait accompli", tandis que les soutiens de l'ancien régime applaudissent. Premier à réagir, le président du RCD, Mohcine Belabbas, qui qualifie l'arrivée de Tebboune de mise en place de "la nouvelle façade civile du système". Pour le président du RCD, le nouveau chef de l'Etat est "incapable de saisir les mutations profondes de la société algérienne et l'ambition collective d'un peuple debout", ce qui fait du discours du nouveau chef de l'Etat "une pâle copie de la langue de bois usitée par tous les intermittents du système propulsés aux hautes fonctions de l'Etat". Tout en rappelant que "le combat continue", Belabbas accuse Abdelmadjid Tebboune d'avoir prononcé un discours qui "annonce des ‘mesurettes' économiques et sociales insignifiantes au regard des exigences citoyennes légitimes pour l'avènement d'un nouveau départ qui consacre d'abord la liberté et la souveraineté du peuple sur son devenir". Depuis Oran où il a participé, hier, à la manifestation du 44e vendredi, l'avocat Mostefa Bouchachi, une des figures du hirak, a exigé des garanties avant d'évoquer un quelconque dialogue. "Il faut d'abord que le système nous rende tous nos droits : manifestation, liberté de la presse, libération de tous les prisonniers d'opinion et, ensuite, nous réfléchirons sur la question du dialogue, c'est-à-dire est-ce qu'il y a une volonté sincère (de la part du pouvoir) pour un dialogue afin d'aller vers la démocratie, ou bien dialoguer juste pour gagner du temps, comme cela a été le cas l'été dernier", a résumé l'avocat. Pour Zoubida Assoul, présidente de l'Union pour le changement et le progrès (UCP), Abdelmadjid Tebboune "n'a pas la légitimité" qui lui permettrait de présider le pays. Pour elle, le chef de l'Etat a prononcé un discours "en contradiction avec les revendications du mouvement populaire". Pour elle, les annonces de Tebboune s'inscrivent dans le "cadre d'une feuille de route du système". Pour l'avocate, la rédaction d'une nouvelle Constitution doit être "le résultat d'un consensus" et d'une "grande consultation nationale". "Si le pouvoir a de bonnes intentions, pourquoi ne laisse-t-il pas les gens se réunir ?" s'interroge-t-elle. Elle insiste sur la prise de "mesures d'apaisement", à commencer "par la libération des détenus d'opinion". Ali Laskri, membre de la direction du FFS, estime, lui aussi, que "rien n'a changé" par la désignation d'Abdelmadjid Tebboune. Selon l'ancien député de Boumerdès, ce que vient de faire le pouvoir est une nouvelle étape dans "la feuille de route du système politique" qui "n'a jamais écouté les Algériens". Quant aux promesses du nouveau chef de l'Etat, Laskri estime qu'il s'agit "de nouveaux slogans" et d'"un discours de circonstance". Pour le représentant du FFS, la solution est dans "un processus constituant" qui doit conduire l'Algérie "vers une nouvelle république". En revanche, Soufiane Djilali plaide pour la participation au dialogue. Le président de Jil Jadid estime que l'installation de Tebboune dans ses fonctions de chef de l'Etat est désormais "un fait accompli". Contrairement aux deux autres responsables, avec lesquels il a participé à un débat sur Radio M, M. Djilali estime qu'il "faut donner" du temps au nouveau chef de l'Etat. Pour lui, ceux qui refusent de négocier "sont surtout sur les réseaux sociaux". Le discours d'investiture était "une manière" pour Abdelmadjid Tebboune de "gagner la sympathie des Algériens". Mais avant de juger, "il faut donner du temps" au nouveau locataire d'El-Mouradia, a-t-il ajouté. L'homme préconise la révision des lois importantes avant d'aller vers des élections législatives qui vont permettre au "hirak d'être bien représenté". Du côté des partisans du pouvoir, la joie est toujours au rendez-vous. Absent de la scène politique depuis de longues années, l'ancien Premier ministre Abdelaziz Belkhadem a demandé à "aider" le nouveau chef de l'Etat "dans sa nouvelle mission" au "service de l'Algérie". Les deux anciens candidats Abdelkader Bengrina et Azzedine Mihoubi ont également affiché leur disposition à "aider" le nouveau chef de l'Etat dans sa mission. Il en est de même pour des partis politiques comme le FLN ou encore l'ANR, qui soutiennent tout ce qui vient du pouvoir.