A moins de deux semaines du premier tour de l'élection présidentielle française, Marine Le Pen, la candidate du Front national, caracole en haut des sondages et garde toujours intactes ses chances d'accéder au second tour, en dépit d'un léger tassement observé ses derniers jours. Et l'hypothèse qu'elle devienne la huitième présidente de la V République relève désormais du domaine du possible. Avec plus ou moins 24 % d'intentions de vote, la candidate frontiste est en situation de favorite et rien n'indique que la tendance va s'infléchir d'ici le 23 avril. Comment le parti d'extrême droite, sous l'ère de son fondateur relevait de l'anecdote, ait pu en un laps de temps s'ériger en première force politique et s'inscrive véritablement dans la perspective de prise effective du pouvoir. Le front national n'est pas un parti comme un autre. Même si au grand jour l'heure est à la dédiabolisation et à la rhétorique apaisée, en coulisse en revanche, celui-ci est incontestablement une mouvance raciste, exclusive, méprisante, fondée sur le rejet des étrangers, cultivant la rancoeur, viscéralement anti-arabe et, surtout, perpétuellement nostalgique de l'Algérie-française. Assumé publiquement et avec fierté, le vote frontiste n'est plus un tabou. Les thèses souverainistes séduisent de plus en plus de monde. Toutes les catégories sociales, du citoyen lambda, aux cadres et chefs d'entreprise, en passant par les forces de l'ordre [ policiers, gendarmes ], y adhèrent avec enthousiasme. Dans la France de 2017, les ferments d'une dérive irréversible du pays dit des Droits de l'homme et du citoyen vers une République recroquevillée, xénophobe, exclusive, sont bien là. Bien que le pays ne soit pas au bord de la guerre civile, il n'en reste pas moins que le climat social est délétère et les tensions sont palpables. Sceptique, le peuple français appréhende son avenir avec crainte. Il doute jusqu'à sa survie dans un monde vorace et au milieu d'une Europe qui se délite. Si une large frange du peuple français et 50% des forces de l'ordre se disent prêts à voter en faveur de l'extrême droite, ce n'est certainement pas le fruit du hasard. Les promesses non tenues, les discours creux et les affaires, mêlant une classe politique déconnectée de la réalité quotidienne des citoyens, achèvent de convaincre des pans entiers de la population que la caste au pouvoir se préoccupe de ses propres intérêts et de ceux de ses proches, se sert à loisir des deniers publics, quand la majorité est récurremment invitée à se serrer la ceinture à travers des politiques d'austérité qui obèrent le pouvoir d'achat des plus démunis. Le refuge est tout indiqué : Le Front national. Pour accéder au pouvoir, Marine Le Pen dénonce « le système ». En candidate du peuple, elle se dit soucieuse du sort de ce même peuple. Il exploite le marasme économique qui frappe la France, procède par le déni et le mensonge, assoit la peur et désigne un ennemi : l'étranger. Et ca marche ! Sauf que le remède au mal français est plus dangereux que le mal lui-même, avertissent les antifascistes.