Les français sont appelés à voter, mais dans un contexte marqué par la recrudescence de la menace terroriste. Bien que des nouvelles lois antiterroristes aient été votées et l'état d'urgence décrété depuis les attentats de novembre 2015, l'attaque de la nuit de jeudi à vendredi, qui avait fait deux morts, un policier et l'assaillant, a montré encore une fois la vulnérabilité de l'Etat français face au fléau du terrorisme. Une réalité sur laquelle sont longuement revenus en conférence de presse, tenues vendredi matin, après avoir annulé leurs sorties, certains candidats pour «exploiter sans vergogne la peur et l'émotion à des fins exclusivement politiciennes», a accusé le Premier ministre, Bernard Cazeneuve, en réplique aux attaques dont a fait l'objet (s)on gouvernement. Dans son viseur : la candidate du Front national et le chef de la droite, François Fillon. L'un et l'autre en difficulté en cette fin de campagne sont soupçonnés d'instrumentaliser le lâche attentat et surtout l'émotion qu'il a suscité auprès des Français ainsi qu'à travers le monde, à des fins électoralistes, le tout à quelques heures du début des opérations de vote. L'on ne peut accuser le gouvernement de laxisme puisque, pour assurer le bon déroulement du scrutin, cinquante mille gendarmes et policiers, auxquels s'ajoutent sept mille soldats de l'opération «Sentinelle», sont déployés sur le terrain, sans toutefois, reconnaît le gouvernement, qu'il soit possible de mettre un policier derrière chaque citoyen et à chaque bureau de vote, au nombre de soixante sept mille, répartis en métropole. Les hommes et femmes politiques qui prétendent être capables de parvenir à une situation de «risque zéro» sont dans le mensonge et le déni total, assènent des observateurs avisés dans le domaine de la sécurité. La solution, suggèrent-ils, passe par une prise de conscience du danger terroriste sans verser dans la paranoïa, ainsi que par une coopération internationale et une étroite collaboration qui intègre tous les pays victimes et/ou ayant une grande expérience en matière de lutte contre le terrorisme. Le vote intervient également après une campagne hystérique, qui a vu le débat de fond sur les sujets essentiels, le chômage, la menace terroriste, la santé, l'éducation (...), en l'occurrence, éclipsé par les révélations médiatiques et les discours sur la moralisation de la vie publique, un débat, par ailleurs, exclusivement concentré sur l'immigration, une question de second plan aux yeux de la majorité des Français, selon bon nombre d'études d'opinion. Sur bien des aspects, cette campagne aura été très utile. D'abord, par une participation très élevée aux deux primaires, preuve d'une appétence pour la chose politique et de la bonne santé de la démocratie, les Français avaient voulu donner gage de sa volonté de s'approprier cette élection. Ensuite, elle aura eu le mérite de mettre à nu des comportements scandaleux jusqu'ici tolérés. Puis, elle aura permis de fédérer autour de la nécessité d'un changement radical des moeurs politiques en général, de poser les jalons d'une recomposition du paysage politique et, enfin, de bouleverser profondément ce système bipolaire qui a prévalu depuis la fondation de la Ve République. A l'opposé des élections précédentes, où les projets proposés, et qui furent à chaque fois plébiscités, étaient généralement l'émanation des deux partis (gauche et droite) de gouvernement, celle de 2017, en revanche, offre un large choix de programmes, portés, aussi, par des personnalités politiques hors partis, sortis des sentiers traditionnels, dont les chances de briguer la magistrature suprême dépassent largement celles des candidats bénéficiant de structures et de logistique partisane. Notons enfin que le comité de campagne du mouvement «En Marche!» a rendu public, jeudi 20 avril, un communiqué qui a fait état d'un échange téléphonique entre Emmanuel Macron et l'ex-président américain, Barack Obama, qui a «souhaité le meilleur en cette fin de campagne et bonne chance», à l'ex-ministre de l'Economie, a-t-on précisé encore dans le communiqué. Même si l'ancien président américain n'a pas clairement apporté son soutien au candidat d'«En marche !», il faut bien admettre que ce coup de fil est loin d'être anodin.