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Cannes 2006, la mise à jour
Publié dans El Watan le 07 - 06 - 2006

Comment expliquer ce nouveau regain d'intérêt des cinéastes pour les humbles et les dominés ? S'agit-il, comme le propose un sociologue, du regard de gens riches qui aiment à monter les marches du luxe pour s'asseoir et regarder, le temps d'un film, le destin des pauvres ? Ou plus sérieusement sommes-nous entrés, dans le sillage de l'humanisme retrouvé du cinéma américain, dans une vraie remise en cause des valeurs occidentales dans l'histoire contemporaine des rapports entre les opprimés et les oppresseurs ? A un moment où les gauches européennes rivalisent de protectionnisme avec la droite, et où certains intellectuels bien pensants s'installent dans leur nouveau statut de réactionnaires modernes, ce regain d'engagement des cinéastes du monde entier est une vraie bouffée d'oxygène.
Ken Loach est loin d'être un converti. Après avoir obtenu le prix du jury en 1993 avec Raining Stones, et celui du meilleur scénario en 2002 pour Sweet Sixteen, il a enfin reçu cette année la suprême récompense à Cannes pour Le vent se lève, après une vie artistique entière consacrée à la défense des laissés-pour-compte. Son film évoque l'histoire de la lutte des Irlandais en 1920 contre les sanguinaires troupes anglaises connues sous le nom de Black and Tan.
Mais Ken Loach raconte aussi comment après le traité, les familles irlandaises se déchirent. Le film traite d'une lutte coloniale qui a duré presque un siècle, mais l'ombre du conflit de l'Irlande du Nord plane sur ce récit poignant de vérité. La guerre est un thème récurrent dans le cinéma de Ken Loach qui, après deux ans dans l'armée de l'air, avait choisi de se rendre à Oxford pour étudier le droit. Observateur du réel, le cinéaste cherche pour chacun de ses films à capter un contexte social ou politique, mais il aime également se plonger dans l'histoire. C'est dans cette optique qu'il traite de la guerre d'Espagne dans Land of Freedom et du Nicaragua sandiniste dans le magnifique Carla's Song.
Mais avec Le Vent se lève, Ken Loach s'attaque frontalement au passé colonial de la Grande-Bretagne. Lors de la remise du prix à Cannes, il a eu ces mots en anglais : «Nous espérons que notre film constitue un petit pas dans le rapport des Britanniques avec leur passé impérialiste.» Et d'ajouter : «Si nous osons dire la vérité sur le passé, peut-être oserons-nous dire la vérité sur le présent.» Le réalisateur constate qu'«il y a encore aujourd'hui des armées d'occupation quelque part, auxquelles les gens résistent. Et je n'ai pas besoin de préciser dans quel endroit la Grande-Bretagne a actuellement et illégalement une armée d'occupation». En faisant le lien avec l'invasion de l'Irak, Ken Loach met délibérément et fort justement sur le lien évident entre des attitudes guerrières qui puisent leur source dans une culture coloniale jamais remise en question. Lors de la conférence de presse, le scénariste Paul Laverty est allé encore plus loin en déclarant : «Nous devrions avoir comme objectif de revoir l'histoire coloniale britannique, de mettre en lumière ce qui a été commis comme atrocités en Inde ou au Kenya au nom de l'idée civilisatrice d'un empire.» Il faut souhaiter que M. Douste-Blazy et les initiateurs de la loi méprisable sur les «bienfaits» de la colonisation voient le film et méditent sur les propos de Ken Loach et Paul Laverty.
Nous sommes loin en tout cas de la frilosité extrême avec laquelle, en dehors de rares exceptions, le cinéma français a jusqu'ici abordé le thème de la culture coloniale et de ses répercussions sur un des taux les plus élevés de xénophobie et de racisme dans le monde. L'aliénation reste considérable et, comble d'ironie, il semble bien que c'est aux réalisateurs issus de l'émigration que va échoir le rôle de décoloniser les écrans français. Rachid Bouchareb est l'un de ceux-là. L'auteur de Cheb portait le sujet comme un mal à exorciser. Indigènes aborde pour la première fois la question du rôle joué par les 110 000 appelés maghrébins dans la libération de la France en 1944-1945. Il raconte aussi comment ces derniers sont devenus les laissés-pour-compte d'une France amnésique qui n'hésite pas à tirer sur eux dès leur démobilisation, comme en mai 1945 à Sétif.
Le titre fait clairement référence au Code indigénat imposé en 1881 par la France coloniale et qui définit l'indigène comme une personne native du pays, mais ne jouissant pas de mêmes droits que les colons. C'est précisément de cette émasculation de l'identité, dont parlait récemment le président Bouteflika. Faut-il que l'amnésie coloniale soit si profonde pour qu'une simple évidence arrive encore à susciter en France un tel émoi ? Dans ces cas, mieux vaut parler d'autisme !
Indigènes doit sans doute beaucoup à son réalisateur, mais aussi à son producteur Djamel Debbouze. Pour ce dernier, «il s'agit d'expliquer aux jeunes beurs qu'ils ne sont pas nés en France par hasard». Officiellement, le film a été coproduit par la France patrie d'accueil des protagonistes, la Belgique, mais aussi le Maroc et l'Algérie. A ma connaissance, il s'agit là de la première coproduction entre les deux voisins maghrébins. On le doit largement à Djamel Debbouze et à tous ceux qui ont eu le courage de se placer au-dessus des contingences conjoncturelles. Mais est-ce le fruit du hasard, le film était absent de la sélection française.
Autre sujet de satisfaction, les comédiens comme Sami Bouajila, Roshdy Zem, Djamel Debbouze ou Samy Naceri sont originaires des trois pays du Maghreb et le fait de ne pas les dissocier pour l'attribution du prix d'interprétation a suscité une joyeuse émotion, dont Cannes gardera longtemps le souvenir.
De guerre, il en est aussi question dans Flandres de Bruno Dumont. Un jeune agriculteur doit partir de sa région jadis dévastée par les batailles de 1939-1945, mais cette fois pour une guerre plus lointaine. Mais de quelle guerre s'agit-il dans ce film étrange ? Celle d'Irak ou de l'Afghanistan aujourd'hui ou d'Algérie ? Seules quelques bribes d'arabe parlé donnent une indication sur la sale guerre qui continue de hanter les mémoires européennes contemporaines. A partir d'un thème biblique, le Mexicain Alejandro Gonzales Inarritu a lui dénoncé, à sa manière, la guerre comme ferment de discorde entre les hommes.
On devine dans l'empire qu'il décrit le rôle de l'Amérique actuelle. Selon Inarritu, lauréat du prix de la mise en scène, «l'incompréhension engendre la paranoïa et tout le monde est, dès lors, un terroriste en puissance. Cette idée est devenue obsessionnelle aux Etats-Unis». Pour le palmarès du dernier festival de Cannes, les uns attendaient Volver ou Marie Antoinette, les autres s'impatientaient de voir l'inutile Da Vinci Code, mais en fin de compte, et grâce à un jury exceptionnel, ce festival, si décrié parfois, a fait donné une leçon d'humanité aux quelques intellectuels réactionnaires qui comme BHL continuent à vivre de culture coloniale.


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