Plus de 42 284 ressortissants étrangers ont été refoulés aux frontières algériennes au cours de la dernière décennie sur un total de 62 399 ressortissants étrangers éloignés. La même période, environ 70 000 migrants irréguliers ont été enregistrés par les autorités de contrôle. Aussi, de 2000 au 1er semestre 2007, quelque 20 000 personnes ont été expulsées du territoire national. C'est ce qu'a fait ressortir le rapport officiel – dont une copie nous est parvenue hier – déposé par notre pays le 3 juin 2008 devant le comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Cet organe relevant du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme est composé d'experts indépendants chargés de veiller à l'application par les Etats parties de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.Entrée en vigueur en mars 2003, elle a été ratifiée par 20 Etats, y compris l'Algérie, en novembre 2005. Curieusement et bien qu'ils soient particulièrement concernés, aucun Etat de l'Union européenne n'y a, à ce jour, adhéré. Notons, en outre, que malgré un léger retard – elle devait le faire le 1er août 2006 tel qu'arrêté par le comité –, l'Algérie est le seul pays dans la région à avoir déposé son rapport sur la situation des migrants travaillant sur son territoire. En effet, malgré leur adhésion, le Maroc, le Sénégal et la Mauritanie demeurent inscrits aux abonnés absents. Le comité onusien attend toujours leur rapport, et ce, depuis respectivement le 1er juillet 2004 pour les deux premiers et le 1er mai 2008 pour le dernier pays. Toujours à propos des travailleurs migrants en Algérie, le même rapport sur la mise en œuvre des droits consacrés par la Convention fait ressortir qu'en moyenne 7000 migrants clandestins sont annuellement interpellés sur le territoire national. Travaillant essentiellement dans le secteur informel, ils y arrivent en masse soit pour constituer un certain pécule dans le but de tenter l'émigration vers l'Europe, soit pour s'y installer durablement, indique le rapport. Il y est, en outre, relevé que l'Algérie a pris en charge les frais de rapatriement de centaines d'immigrants clandestins africains dont la dernière a concerné environ 600 ressortissants subsahariens issus du Mali, de République de Guinée, du Cameroun, du Sénégal, du Ghana, du Burkina Faso, de la Guinée-Bissau et du Nigeria. Ils séjournaient illégalement depuis plusieurs années dans la région frontalière de Maghnia (wilaya de Tlemcen) dans le but de rejoindre l'Europe, via le Maroc. Il faut dire que le phénomène des flux migratoires irréguliers prend des proportions de plus en plus grandes et est alimenté par différents facteurs d'attirance et d'incitation, notamment par l'émergence de réseaux transnationaux de passeurs. Ce qui a amené les autorités algériennes à intensifier les opérations de contrôle aux frontières terrestres (7000 km) et maritimes (1 200 km) en y affectant d'importants moyens de contrôle humains et matériels. La même source signale que ces dernières années, nombre de migrants économiques tentent de détourner la procédure de demande d'asile en vue de contourner les dispositions réglementaires en matière d'entrée et de séjour en Algérie. Cette tendance à faire l'amalgame entre les véritables demandeurs d'asile et les migrants clandestins est rejetée par l'Algérie. Ce constat nous a été confirmé par Pablo Mateu, le délégué général du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) en Algérie lorsqu'il indique qu'officiellement son organisation compte seulement 105 réfugiés subsahariens. Or, pas moins de 800 demandes d'asile politique émanant de migrants venus de divers pays subsahariens y sont annuellement enregistrées. « Après enquêtes et études approfondies de toutes ces demandes, il s'avère souvent que 95% d'entre elles sont non justifiées voire infondées. Ces migrants sont en fait des migrants économiques et non politiques. Leur demande de bénéficier du statut de réfugié est rejetée par le HCR », nous a précisé le haut responsable onusien. Du côté des officiels algériens, les frontières terrestres sud demeurent la principale source de migrants clandestins en provenance d'une quarantaine de pays subsahariens qui rejoignent les wilayas du Sud, notamment les villes de Tamanrasset et de Ghardaïa, avant d'atteindre pour la majorité d'entre eux, les villes côtières du Nord. Parmi les modes opératoires utilisés, ils citent la falsification de documents de voyage par la substitution de photographie et la détention de passeports volés. Les filières de passeurs qui s'y sont installées mettent à profit l'étendue des frontières terrestres et le relief difficile pour acheminer leurs « clients » sur le territoire national en empruntant des voies détournées. Ces dernières années ont vu également l'arrivée de clandestins originaires du continent asiatique, relève le rapport. Celui-ci est actuellement examiné par les experts du comité onusien. Au terme de cet examen, ils devront faire part aux responsables algériens de leurs préoccupations ainsi que de leurs recommandations sous forme d'« observations finales ».