Près de 95% du commerce extérieur en Algérie transitent par la dizaine de ports implantés le long de la côte du pays. Des infrastructures d'inégale importance et sans vraie spécialisation qui, soutiennent les spécialistes, restent dominées par une configuration imposée par la structure des exportations et qui, comme tout le monde le sait, est très largement trustée par les hydrocarbures. Le même point de vue rappelle que les investissements ont naturellement échu aux ports pétroliers, maintenant les autres loin des schémas de modernisation qu'implique à tout le moins l'évolution vers une économie plus libérale, et disons-le dans le cas de notre pays, un accroissement vertigineux du volume des importations. L'évolution faramineuse du commerce à l'importation, à la faveur de l'embellie financière que vit le pays depuis les début des années 2000, était, certes, trop subite pour ne pas bousculer des schémas organisationnels qui y étaient historiquement peu préparés. Mais la nouvelle donne a l'heur de mettre en demeure les pouvoirs publics de vite faire de l'ordre dans ce secteur névralgique. Fait symptomatique de l'incohérence et de la mollesse de la démarche de modernisation, l'on en est encore, plus de trois ans après son énoncé théorique, à tenter sporadiquement la privatisation des activités commerciales au niveau des ports les plus importants du pays. Le manque de transparence et de dialogue avec les partenaires sociaux fait surgir systématiquement le spectre du blocage de l'activité portuaire avec son lot de préjudices financiers et de contrecoups fâcheux sur la réputation des quais algériens à l'ère des fameuses autoroutes de la mer. Loin des batailles doctrinales sur le bien-fondé ou non de la privatisation de certains segments de ce secteur stratégique, demeure posées des problématiques un peu plus prosaïques, mais qui n'hypothèquent pas moins l'essor des entreprises portuaires et la fidélité de leurs partenaires. Les entités portuaires doivent ainsi composer avec le legs de longues années de gestions étatique, avec leurs assortiments d'outils bureaucratiques, de sureffectifs et de déficit en investissement. Le phénomène de l'envasement, réduisant d'année en année les capacités théoriques des ports, l'encombrement de leurs quais par des cargaisons dont les propriétaires profitent souvent des failles et autres lenteurs juridiques pour disposer des surfaces portuaires comme des espaces d'entrepôts, la congestion des voies d'accès et de communication avec l'environnement, conséquence de l'improvisation quand il s'agit de penser aménagement du territoire, sont autant de tares qui réduisent dramatiquement les marges de manœuvre. Il y a quelques mois, la direction du port de Béjaïa, deuxième port le plus important du pays, avait ainsi trouvé sérieusement à redire sur le tracé de l'autoroute Est-Ouest qui, contournant pratiquement la wilaya, brouillait complètement les projections de développement de l'infrastructure portuaire, la première au niveau national à avoir engagé l'expérience des terminaux à containers avec un partenaire étranger. Les ports algériens en sont encore à espérer une dynamique de rattrapage pour limiter les coûts de trop grande attente en rade et de perturbations de la chaîne de circulation des marchandises. Le débat reste, malheureusement, envasé dans cette histoire de concession partielle de segments de l'activité, alors que l'écheveau de la problématique implique une prise en charge globale du port et de son environnement économique.