La grande chanteuse Oumou Sangaré était aux cimes de l'Ahaggar, lors d'un concert mémorable. Tamanrasset De notre envoyé spécial Il était 20h30 quand elle est apparue. Impeccable d'élégance, elle avançait avec un port de reine. Avant-hier soir, Oumou Sangaré chantait pour la première fois en Algérie, au Festival international des arts de l'Ahaggar (Abalessa-Tin Hinan), dans sa première édition. Ce concert est l'événement phare du festival. Le plus attendu d'ailleurs. Devant la scène, aménagée en plein air, à deux pas de la maison de la culture de la wilaya de Tamanrasset, une foule compacte, composée de familles, de jeunes et de moins jeunes, attendait son idole. Oumou Sangaré est sur toutes les lèvres. Dans tous les cœurs aussi. Cette femme, au charisme inaltérable, cumule une carrière artistique d'une vingtaine d'années. La femme, perchée sur ses talons aiguille et dans une robe blanche aux rayures bigarrées, étrenne et entraîne son public dans une spirale musicale. La musique, aux rythmiques syncopées, est toute proche des musiques targuies. Oumou, la diva malienne, étale alors, au grand bonheur des festivaliers, son riche répertoire, depuis son premier album Moussoulou (femme) enregistré en 1989, jusqu'à son dernier opus, intitulé Seya (joie). Tour à tour, la chanteuse interprète, d'une voix grave et joyeuse, Ah Ndiya, Yudji, Seya, Wili Wantou ainsi que d'autres morceaux choisis. Certaines musiques modernes, d'autres traditionnelles. Oumou Sangaré ne chante pas seulement l'amour. Ses textes révèlent une femme au grand cœur, qui n'hésite pas à libérer une parole indignée pour dénoncer les mariages forcés, la polygamie et l'excision dans la société malienne et africaine. Cet engagement lui a valu une franche et méritoire reconnaissance mondiale. L'Unesco l'a décorée en 2001, et elle est actuellement ambassadrice de la FAO. Et comme pour l'honorer, à sa manière, le public, cantonné derrière une barricade de sécurité, le lui rend bien : ovations nourries et danses rythmées. Du pur style africain ! Oumou jubile. Impossible de ne pas se laisser entraîner par ce fleuve de sonorités enivrantes. Même le bluesman et guitariste malien, Semba Touré, et la conteuse ivoirienne, Sabine Pokora, se sont invités sur la scène enjolivée par les jeux de lumières pour un tour de danse endiablé. Parmi les festivaliers, c'est le délire. On reprend en chœur. On bat des mains. C'est dire que l'ambiance n'envie rien aux meilleures scènes mondiales. Il est 22 h, Oumou quitte d'un pas souple la scène. En face, ses fans n'ont d'yeux que pour elle. La chanteuse est émue. « C'est un plaisir pour moi que de me produire en Algérie. Je suis fière. Le public était magnifique. Il faut reconnaître que tout le monde est content », dira-t-elle, d'un ton grave, le sourire en coin, non sans exprimer sa disponibilité pour une tournée musicale en Algérie. Le spectacle n'est pas encore terminé. Place maintenant au chanteur targui, Abdellah Mesbahi, venu de Djanet. Digne élève du regretté Athmane Bali, celui-ci part sur les pas de son maître. Impeccable interprétation. Le public, fin connaisseur du riche répertoire targui, reprend en chœur certaines des chansons, merveilleusement entonnées par le virtuose Mesbahi. Vers 23 h, c'est au groupe Lanbi Lanfa (réveil-coucher) du Niger de clôturer en beauté cette soirée musicale. Les invités se dispersent, le cœur rempli de joie. Oumou Sangaré est passée par là !