Plusieurs associations des familles de victimes du terrorisme ont décidé de déposer des plaintes contre Madani Mezrag. Le fossoyeur de Jijel a, dans un entretien publié récemment par l'hebdomadaire L'Intelligent, fait l'éloge, de façon odieuse, de la décennie noire et tenu des propos blessants à l'encontre de toute l'Algérie. « Ceux qui veulent me poursuivre en justice sont libres de le faire. Je n'ai peur de rien. Je n'ai peur de personne », a-t-il souligné avec un ton résonnant comme un défi. D'où tire-t-il une telle assurance ? Il est vrai que Mezrag - et c'est lui-même qui le dit - entretient bien ses troupes. En cas de déboires avec la justice, il pourrait toujours les mettre en alerte ! Dans l'absolu, il n'y a rien d'étonnant à ce repenti salisse la mémoire de ses victimes, d'autant plus qu'il demeure toujours, du moins à nos yeux, bien inspiré par l'intolérance, la haine et l'extrémisme. En revanche, la complaisance dont font preuve les autorités officielles et les partis politiques est déconcertante. complaisance La riposte à cette énième offense est venue des associations des familles de victimes du terrorisme. Pas toutes, bien entendu. Il y a des associations qui nagent à contre-courant. L'Organisation nationale des victimes du terrorisme (ONVT), à titre d'exemple, est davantage intéressée par ses luttes intestines que par sa principale raison d'être. « Notre organisation étant sujette à des tiraillements internes, nous n'avons pas encore envisagé de saisir la justice quant aux propos infâmes de ce sanguinaire », a relevé Mme Flici, présidente de l'ONVT, en regrettant que les « bourreaux s'organisent et les victimes s'entredéchirent ». Les autres organisations sont, dans l'ensemble, favorables à une action en justice contre l'ancien émir national de l'Armée islamique du salut (AIS). Pour traiter cette question, le bureau national de l'association Somoud s'est réuni hier. « Le principe d'une plainte contre ce criminel est dores et déjà retenu. Nous sommes en concertation avec nos avocats pour étudier les termes de la plainte », a souligné Ali Merabet, président de Somoud. Plus audacieuse, Mme Cherifa Kheddar, présidente de l'association Djazaïrouna, dont les membres s'apprêtent à poursuivre en justice l'ancien terroriste, n'a ménagé ni les partis politiques qui ont mené campagne, tambour battant, en faveur de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, ni les hautes autorités du pays qui, selon ses dires, ont fait montre d'une permissivité inadmissible à l'égard d'un ancien faucheur de vie. « Comment se fait-il que des gens qui ont fait de ce projet leur principal cheval de bataille acceptent de voir transgresser le texte sans qu'ils émettent la moindre réaction ? », s'est-elle interrogée. De son côté, Mme Halaïmia de l'Organisation nationale des victimes du terrorisme et des ayants-droit (Onvitad), n'a pas exclu une action commune avec les autres associations. Cependant, elle estime nécessaire de recourir à l'ONU si le « chef des terroristes » ne serait pas poursuivi et condamné. Toutefois, la plupart des organisations des victimes du terrorisme sont résolues à traquer l'émir de Jijel. Et si les tribunaux algériens leur ferment les portes, elles se sont déclarées prêtes à saisir les instances internationales.