Les scandales qui secouent les banques publiques n'ont pas l'air de cesser. L'opinion publique est complètement abasourdie par les annonces en cascade, qui décrédibilisent le système financier algérien, déjà très critiqué pour ses pratiques bureaucratiques, ses lourdeurs dans la prise de décision et marqué par un interventionnisme de l'Etat excessif. Les opérateurs algériens et étrangers attendaient après notamment la remontée du prix du pétrole, qui a fourni à l'Algérie une exceptionnelle et inattendue bouffée d'oxygène financière, une restructuration en profondeur du système bancaire et financier. Les pouvoirs publics ont été, hélas, incapables d'engager une telle politique, qui aurait pu très certainement limiter les dégâts. Les querelles de prérogatives entre différents centres de décision, les visions divergentes sur la manière de conduire les affaires économiques du pays, les rapports de force entre clans du pouvoir ont totalement bloqué la réforme bancaire et le processus de modernisation. On a eu droit à beaucoup de rhétorique, sans plus. Du temps a été perdu, au moment où il fallait trancher, opérer des choix, tracer de nouvelles voies. Le secteur en paye aujourd'hui le prix fort. Les dégâts financiers sont énormes. Les sommes détournées sont conséquentes et la crédibilité de l'Etat en prend un coup. Faut-il croire que les forces politiques et économiques, liées aux milieux mafieux et rentiers, poussent au pourrissement en maintenant la confusion et en empêchant toute transparence... Il y a une profonde et légitime interrogation de l'opinion publique. Après les scandales des banques privées, l'on pensait que l'Etat algérien allait en tirer toutes les leçons. En se dotant de mécanismes de contrôle appropriés et efficaces - la dilapidation de sommes aussi importantes risque malheureusement de se poursuivre - elle semble proportionnelle aux avoirs que l'Algérie engrange annuellement grâce aux réajustements du prix du pétrole. Cette situation a pour effet de porter un coup sévère au moral des Algériens et les conforte dans leurs certitudes que « tout est corrompu, et qu'on laisse faire, pour mieux se servir ». Cette déliquescence ne profite qu'à ceux qui veulent faire de notre pays un grand bazar. Les pouvoirs publics gagneraient à agir promptement pour arrêter la saignée en activant la modernisation du secteur, en s'appuyant, fortement et très franchement, sur la compétence, le dévouement et l'honnêteté des cadres des banques publiques qui souffrent dans leur grande majorité de tant de dérives.