Il est un lieu commun de dire qu'Alger peine à se débarrasser du repoussant décor, notamment les tas d'ordures et gravats qui enlaidissent ses rues, ruelles et culs-de-sac. Bien que Netcom et Asrout mobilisent un tant soit peu leurs effectifs, l'espace urbain, avec lequel nous composons, n'inspire pas moins du dégoût, surtout lorsqu'on convoque les douces souvenances d'Alger où il faisait bon vivre. Lorsque les douérate de la mégalopole d'Ibn Mezghenna fumaient le jasmin, l'églantine, le géranium et autre basilic... Lorsqu'on faisait passer à la chaux vive les maisons à l'orée du printemps et surtout à l'approche de Sidna Ramadhan. On l'appelait Alger la Blanche qui embrassait l'une des plus belles baies au monde. Mais autres temps, autres mœurs. La blancheur immaculée de la cité de jadis est altérée. Le réflexe écocitoyen et l'esprit collectif d'autrefois ont déserté les lieux pour laisser place à la hideur d'un présent chargé de déplaisir. Mais Dieu merci, il y a toujours quelque part de bonnes âmes, qui par défi et le compter sur soi, tiennent à redonner à leur quartier son lustre d'antan. En sillonnant le dédale de la commune d'Alger-centre, plus précisément à hauteur de la rue des Frères Bennacer (ex-rue Levacher), nous fûmes frappés par la louable initiative qui se résume dans l'embellissement de la «houma». N'est-ce pas que «les volontés faibles se traduisent par des discours, les volontés fortes par des actes», pour reprendre Gustave le Bon ? Décidés à prendre le taureau par les cornes, une vingtaine de jeunes sont passés à l'action, ne ménageant aucun effort pour rendre leur cadre de vie propret et clean. Nettoyage, badigeonnage, peinture, colmatage d'anfractuosités ici et là, mis en place de pots de fleurs chassant l'aspect hideux qui caractérisait, il y a quelques jours, les lieux. «Au lieu de s'adosser à un ‘‘hit'', tuant le temps avec un ‘‘nass nass'' à la main, nous avons lancé le défi avec nos moyens du bord pour rendre à notre quartier ses lettres de noblesse en matière de look et le parer de ses plus beaux atours», lançait le jeune Khalimoh, l'icône du quartier, qui s'affaire avec ses pairs à remettre, dans une ambiance joyeuse, les pendules du quartier à l'heure. A restituer le cadre de vie d'une médina digne de son nom. Et de renchérir : «désormais, nous comptons sur notre force et nous nous appliquons à la tâche de manière assidue.» Cet engouement suscité chez les jeunes des Frères Bennacer n'a, d'ailleurs, pas tardé à faire l'effet boule de neige. Les jeunes de la rue des Frères Benzine (ex-rue Perret) et le quartier Mohamed Chaïb ont vite fait de suivre le bel exemple. Le mouvement associatif s'est-il mis en branle ? Espérons que cette action ne soit pas un feu de paille. A charge aux autorités locales d'encourager les jeunes volontaires et généraliser ce genre d'opération à travers les quartiers d'une capitale qui n'arrive pas à se défaire de ses oripeaux.