Le mot ressemble à un verbe berbère ou arabe, mais il s?agit d?un emprunt au français «déserter», avec la chute du «d» initial et l'adaptation des voyelles aux systèmes phonétiques locaux. La forme ancienne du mot était dizirti et on l'emploie encore parfois ainsi ; puis le mot, qui a dû paraître trop long et trop lourd, a été raccourci. Cette tendance au raccourcissement des mots étrangers se retrouve dans d'autres langues : le français n'a-t-il pas «coupé» l'arabe amir al-bahr (littéralement «prince des mers») pour en faire «amiral» ? Mais revenons à zarti : le mot est surtout employé comme verbe avec le sens français de «déserter», en parlant d?un soldat, mais le mot s'applique aussi à des cas moins graves que la désertion. Ainsi, on l'emploiera aussi au sujet d?un appelé qui fait le mur et se fait attraper. Le nom du déserteur ou de l'insubordonné est formé par l?ajout du préfixe formateur des noms d'agent, «m» en arabe et «am» en berbère : m?zarti et amzarti. Le verbe zarti est employé parfois dans le sens d'«abandonner». Ainsi, wa'lach zartit ? (pourquoi as-tu abandonné la partie ?) ; mais dans ce sens, c'est un autre verbe qui est employé, bett?el (au sens propre, manquer, ne pas faire). Ainsi, bett'el lemçid (il a manqué l?école, il a fait l?école buissonnière) ; bett'el lxedma (il n'est pas allé au travail). Une des manifestations de la virilité est d?affirmer qu'«on n'abandonne pas», c'est-à-dire qu'on ne renonce pas aux attributs de cette virilité : respect de la parole donnée, dignité, etc. Redjla ula bett'elna ? (nous sommes des hommes, ou alors avons-nous renoncé à l'être ?) demande-t-on alors à ceux qui doutent de ces attributs. Toujours dans ce sens de manquer, renoncer, on utilise le français «abandonner» : bandonna leqraya (il a abandonné ses études), bandonna wladu (il a abandonné ses enfants), etc.