Résumé de la 2e partie Quand Hélène va travailler, c?est Valérie, sa fille, qui s?occupe de Patrick, 11 ans, malade. Il respire grâce à un appareil électrique. Seulement voilà : Hélène sait bien qu'en demandant du secours aux services sociaux, elle risque de perdre Patrick ; ils le remettront à l'hôpital, ils jugeront sa situation «trop précaire», comme ils disent. C'est pour cela qu'Hélène se bat depuis des mois et calcule, calcule à n'en plus finir. Calcule l'argent, le temps, les risques, les inconvénients, elle n'en peut plus de calculer. Si elle pouvait, elle pleurerait un bon coup, elle abandonnerait, elle appellerait les pompiers, la police, un médecin pour qu'on la délivre. Elle pourrait, elle devrait le faire, car cette pompe manuelle n'est que provisoire, mais une sorte d'hébétude la saisit. Comme un automate, Hélène prend la place de sa fille pour actionner la pompe. Elle s'entend parler, organiser, elle s'entend lutter comme d'habitude : «Valérie, fais manger tes frères... Apporte-moi du potage pour Patrick... Couche le petit... Ferme le gaz... N'oublie pas le réveil pour demain... Vous irez à l'école seuls, tu demanderas à la maîtresse de revenir à la maison, tu diras que j'ai besoin de toi, je te ferais un mot, tu préviendras la voisine, attention à la bougie... Couchez-vous sagement, je vais rester là... Apporte-moi du café, il ne faut pas que je dorme...» Non, il ne faut pas qu'elle dorme. Il faut actionner la pompe sans arrêt, sans discontinuer. La vie, le souffle de Patrick en dépendent. Il est là, confiant, dans sa machine, soulagé d'avoir retrouvé sa mère ; il mange doucement, il s'endort doucement. Hélène est raide sur sa chaise. Le mouvement est d'une régularité douloureuse. Hélène change de bras toutes les cinquante fois. Elle compte pour se tenir éveillée. Inspiration, respiration... Une... deux... trois... C'est comme si elle respirait à la place de son fils, au même rythme. Hélène est un robot, elle ne pense plus, elle compte, elle respire, elle change de bras, elle recommence. Hélène n?existe plus. Il fait noir. Dans le silence, le petit bruit du poumon rythme sa propre fatigue. Jambes et paupières lourdes, Hélène s'endort parfois une demi-seconde, le temps d'un cauchemar... «De la folie, c'était de la folie.» Et c'était dans la nuit du 25 octobre 1965, quelque part aux Etats-Unis. Le mardi 26 octobre 1965, à sept heures du matin, Patrick ne s?est pas réveillé dans son poumon d'acier. Hélène n'a pu se rappeler quand et combien de temps elle avait cessé d'actionner la pompe... Quand et combien de temps elle s'était endormie sur sa chaise. Elle ne s'est aperçue de rien. A-t-elle dormi une heure ou cinq minutes ? Quelle importance... On ne mesure pas le désespoir à la seconde près.