Résumé de la 5e partie n Après l'avoir aidé, le canard demande un précieux service au cheval noir : ramener le mouton vendu pour dissiper la tristesse des deux sœurs. Je ne demande pas mieux, répondit le cheval noir, mais je ne vois pas comment m'y prendre. S'il ne s'agissait que de les rattraper, lui et son cavalier, je ne serais pas en peine. Si mal accordés, ils n'auront pu faire grand chemin. Non, le difficile serait plutôt de persuader à mon ancien maître d'abandonner son mouton. — Il sera temps d'aviser quand nous les aurons rejoints, dit le canard. Conduisez-moi d'abord auprès d'eux. — C'est très joli, mais en admettant que ces deux petites filles rentrent en possession de leur mouton, réussiront-elles à l'imposer ici ? A ce qu'il m'a semblé ce matin, les parents n'ont pas été fâchés de se débarrasser de cette pauvre bête. — C'est vrai, dit Marinette, et pourtant je ne serais pas surprise qu'ils commencent à regretter ce qu'ils ont fait. — En tout cas, dit Delphine, je me sentirais plus tranquille si l'oncle Alfred- était prévenu et qu'il se trouve là à notre retour. Le cheval noir s'informa si l'oncle Alfred demeurait bien loin et, sur ce qu'on lui répondit qu'il fallait compter deux heures de marche au bon pas, il promit de galoper jusque chez lui lorsque le mouton serait retrouvé. — Mais, pour l'instant, il s'agit de rattraper notre cavalier. Ne perdons pas une minute. Les petites et le canard sautèrent sur le dos du cheval et, passant à bride abattue sous le nez des parents stupéfaits, disparurent dans un nuage de poussière. Au bout d'une demi-heure de course, ils arrivaient à l'entrée d'un village. — Ne nous pressons pas, dit le cheval en prenant le pas. Et, puisque nous traversons le village, profitons-en pour interroger les habitants. Comme ils étaient aux premières maisons, Delphine avisa une jeune fille qui cousait à sa fenêtre derrière un pot de géranium et lui demanda poliment : — Mademoiselle, je cherche un mouton. N'auriez-vous pas vu un cavalier... — Un cavalier ? s'écria la jeune fille sans lui laisser le temps d'achever. Je crois bien ! Je l'ai vu tout rutilant d'or traverser la place au galop d'enfer, dans un affreux et superbe cliquetis d'armes. Il montait un immense cheval à la robe frisée et comme bouclée, et les naseaux soufflant feu et fumée, tellement que mon pauvre géranium en a perdu un moment sa fraîcheur. Delphine remercia et fit ensuite observer à ses compagnons qu'il ne pouvait s'agir de ceux qu'ils cherchaient. — Détrompez-vous, lui dit le cheval. Il s'agit bien d'eux. Sans doute le portrait est-il un peu flatté, mais c'est ainsi que les jeunes filles voient les militaires. Pour ma part, je reconnais sans peine la toison de votre mouton dans la robe bouclée de l'immense cheval. — Et le feu et la fumée qu'il soufflait par les naseaux ? objecta Marinette. — Croyez-moi, c'était tout bonnement le soldat qui fumait sa pipe. On ne tarda guère à s'apercevoir que le cheval avait raison. Un peu plus loin, une fermière qui étendait du linge sur la haie de son jardin leur dit qu'elle avait vu passer un soldat monté sur un malheureux mouton qui paraissait exténué. — J'étais à la fontaine à rincer mes couleurs quand je les ai vus tourner dans le Chemin Bleu. Vous auriez eu pitié de cette pauvre bête si vous l'aviez vue peiner dans la montée avec ce gros benêt assis sur son dos et qui lui donnait des coups de poing sur la tête pour la presser d'avancer. (à suivre...)