Photo : Riad Par Faouzia Ababsa La fraude qui a émaillé l'élection présidentielle du 9 avril dernier ne sera pas sans conséquences sur notre pays. Louisa Hanoune en est persuadée, voire convaincue. Cette crainte, ce danger, elle les a exprimés hier dans son rapport d'ouverture devant les membres du comité central réunis en session extraordinaire. D'ailleurs, selon elle, certains indices lui donnent raison. Il s'agit en premier lieu de la visite du représentant personnel d'Obama pour le Proche-Orient. George Mitchell était l'hôte de Bouteflika au lendemain de la proclamation des résultats par le Conseil constitutionnel. Le deuxième indice, toujours selon Mme Hanoune, réside dans la précipitation avec laquelle l'Union européenne a transmis ses félicitations au président de la République après sa réélection. L'autre indice est celui, pour reprendre les propos de la secrétaire générale du Parti des travailleurs, qui consiste pour les investisseurs étrangers «à sortir leurs dents». Louisa Hanoune indiquera que toutes les chancelleries en Algérie savent ce qui s'est passé le 9 avril. «Elles ont leurs taupes partout.» Elle reviendra longuement sur la fraude, précisant toutefois qu'elle n'était pas méthodique. C'est la raison pour laquelle les fraudeurs ont utilisé tous les moyens pour bourrer les urnes. «Jusqu'à 16 h 30, personne n'avait la majorité. Pris de panique, les fonctionnaires, sous la pression des présidents d'APC et des chefs de daïra, ont reçu l'ordre de truquer les élections.» «Ils ont dû s'exécuter parce qu'on les a menacés de licenciement», dira encore Louisa Hanoune. En déclarant qu'il voulait la majorité pour pouvoir diriger le pays sans pression, Abdelaziz Bouteflika n'a pas donné l'ordre de frauder, selon elle. Pourtant, précisera-t-elle, c'est ce qui a été compris par «sa clientèle» et tous ceux qui ont des privilèges à préserver. Ils n'ont lésiné sur aucun moyen pour spolier les voix des électeurs. Ils ont même fait dans le régionalisme et tenté de créer des conflits entre tribus, à Khenchela et Oum El Bouaghi, ajoutera-t-elle encore. A Nedroma, le directeur de campagne de Bouteflika a fait mieux. Il a sommé les responsables du PT de quitter la ville parce que c'est celle de Bouteflika (ville natale s'entend). Elle a affirmé également que le PT faisait peur, «car la fraude était dirigée contre nous». Revenant sur le taux de participation, elle dira que, dans le pire des cas, il ne pouvait dépasser 52%. Ce qui est appréciable comparé aux précédentes législatives au cours desquelles les électeurs ont boudé les urnes. Elle rappellera qu'à cette époque l'actuel président de l'APN l'avait félicitée pour sa réélection à un troisième mandat législatif et précisé qu'il avait dit à la direction de son parti que le danger ne venait nullement du RND mais du Parti des travailleurs. Ce même Ziari, dont elle dira qu'il a raté l'occasion de se taire. Lors de son passage à la radio Chaîne II, le président de l'APN avait déclaré qu'on ne règle pas le problème d'un groupe parlementaire à travers la dissolution de l'assemblée. Or, Mme Hanoune, qui fait depuis quelque temps de l'organisation d'élections législatives anticipées son cheval de bataille, a précisé que son parti n'avait de problèmes avec personne. Et que la revendication de la dissolution de l'APN participait d'une action de salubrité publique, tant elle est devenue un danger pour le pays. «S'ils sont sûrs d'eux, ils n'ont pas à avoir peur des urnes», lancera-t-elle. «Cette APN est le produit de la décomposition, elle est constituée de lobbys de l'argent et de représentants des multinationales. Même les ministres FLN souhaitent sa dissolution.» La secrétaire général du PT reviendra à la charge par rapport à l'élection du 9 avril. Elle indiquera que les pouvoirs publics ont refusé de mettre à la disposition des électeurs des urnes transparentes en verre sous prétexte qu'elles coûtaient cher. «Elles ne peuvent pas coûter plus que l'argent qui a été gaspillé par la commission de surveillance des élections qui n'a d'ailleurs servi à rien, si ce n'est à distribuer de l'argent à ses membres.» Et la désormais ex-candidate de renchérir : «Il n'est pas question de nous taire sur ce qui s'est passé, encore moins de nous y adapter. Nous voulons réhabiliter l'Etat et l'acte de voter et en finir avec les pratiques du système du parti unique qui a montré cette fois-ci son visage hideux. Les masques sont tombés et tout est désormais clair.» L'oratrice a par ailleurs démenti les rumeurs selon lesquelles elle serait tombée malade après l'annonce des résultats des élections et que son moral était au plus bas. «Cela veut dire qu'ils ne nous connaissent pas.» Car pour elle, plus que jamais le combat continue.